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Inversion des températures dans la vallée des Belleville (stations des Ménuires et de Val-Thorens, Savoie)

Cette figure représente une inversion de température, un phénomène récurrent lors de certains types de temps par nuit radiative en hiver, mesurée dans la vallée des Belleville en Savoie le 5 janvier 2004 à 4h du matin au niveau des stations de ski des Menuires et de Val Thorens, entre 1660 m et 2900 m et avec 124 sondes de température. La densité du réseau de sonde et le milieu étudié (haute vallée alpine en hiver) font que cette représentation est unique en son genre. On peut observer l’inversion dans le fond de vallée au niveau des Menuires, où la température passe de -11°C à -2°C sur quelques centaines de mètres de dénivelé, avant de se refroidir vers les sommets à 2800 m, et l’uniformité des températures dans le cirque de Val Thorens, avec seulement 3°C de différence sur tout le site qui s’étend de 2200 m à 2900 m.

Températures mesurée le 05/01/2004 à 4h dans la vallée des Belleville (sites des Menuires et de Val-Thorens). MNT: BD IGN Alti. Krigeage avec Surfer. Chaque croix représente un point de mesure

J’ai eu durant ma thèse beaucoup de problèmes pour représenter les phénomènes météorologiques ou climatiques que j’ai observés et analysés, principalement parce qu’il fallait toujours se demander si l’iconographie permettait de répondre aux objectifs fixés. La mise en image était toutefois indispensable parce la représentation des données par des courbes n’aurait pas pu réellement être parlante pour le lecteur. L’iconographie ici a aussi servi à vulgariser les résultats, que ce soit bien sûr pour le lecteur, mais aussi pour le chercheur puisque la visualisation d’un grand nombre de données est impossible si l’on ne passe pas par une représentation graphique.

L’échelle spatiale de l’étude étant particulièrement fine, il était tentant d’utiliser une représentation par MNT et mappage de photo-aérienne, mais j’ai préféré rester sobre afin de ne pas dénaturer par la 3D le sens du message porté par la figure. Celle-ci ne comporte qu’une spatialisation des températures réalisées automatiquement pas krigeage avec un logiciel (le krigeage étant utilisé ici non pas pour interpoler mais pour représenter) et des lignes de niveau issues d’un MNT.

Cette simplicité permet de multiplier les figures des cas à l’envi en fonction des heures de mesure. Il est alors possible de juxtaposer chaque champ de températures (mesurées à des instants différents) pour suivre leur évolution et les corréler avec des informations de niveau supérieur (apparition du soleil, transition entre types de temps, présence de fœhn, tempêtes, etc.).

J’ai aussi choisi cette image parce qu’elle permet de mettre en rapport la configuration spatiale spécifique des températures et les types de temps et types de circulation qui l’ont engendrée, en répondant ainsi aux attentes exprimées par la problématique: quelle est l’influence des échelles supérieures sur le comportement des paramètres météorologiques locaux? Dans ce cas les inversions sont la majorité du temps provoquées par la présence d’un anticyclone puissant et froid principalement situé sur les Îles Britanniques (j’ai crée une classification des types de temps par régression d’échelle pour l’occasion).

Cette image montre aussi la très forte variabilité spatiale des températures en milieu de montagne (même en pleine nuit) à des échelles très fines (chaque sonde est séparée de l’autre par 50 ou 100m), et cela a permis de mettre en évidence certains facteurs responsable de cette variabilité comme la présence de micro-relief protégeant ou non des brises catabatiques, rôle des cuvettes, des parois… et aussi des topo-reliefs, c’est-à-dire les formes de relief aux échelles topoclimatiques (de l’ordre du kilomètre) qui jouent aussi sur les températures, sans d’ailleurs que l’on comprenne encore comment (difficulté de modélisation). Cela répond aussi en partie à la question de l’influence de la topographie et des facteurs externes sur les variations spatio-temporelles des paramètres météorologiques locaux.

Il existe, par ailleurs, dans ma thèse une multitude de figures similaires mais réalisées pour des analyses différentes (températures moyennes, suivi de l’évolution des champs de températures sur une journée, gradient thermique…). D’autres figures représentent aussi le développement des brises thermiques hivernales et notamment la mise en place d’une brise tout à fait méconnue, la brise de pente descendante diurne (brise catabatique), et le rôle du soleil dans l’évolution de sa direction journalière.

Christophe Chaix

Référence de la thèse

CHAIX Ch., (2007). Climatologie hivernale des versants alpins (Savoie): types de temps, températures et vents. Analyse des données météorologiques des domaines skiables. Chambéry, Annecy: Université de Savoie, thèse de doctorat de géographie, 303 p. (consulter).