Sommaire du numéro
N°73 (1-2004)

Minutes de bathymétrie et évolution des fonds marins:

les abords du port de Calais

David AernoutsArnaud Hequette 

D. Aernouts: Université du Littoral-Côte d'Opale 2 DUNKERQUE
Laboratoire de Géomorphologie dynamique et aménagement des littoraux (GEODAL)

Résumés    
A. Hequette: Université du Littoral-Côte d'Opale 2 DUNKERQUE
Laboratoire de Géomorphologie dynamique et aménagement des littoraux (GEODAL)
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Afin d'étudier l'évolution des fonds marins, il est fondamental de connaître le plus précisément possible la bathymétrie. Pour apprécier les modifications globales des fonds marins, les documents nautiques établis par le Service Hydrographique et Océanographique de la Marine (SHOM) sont essentiels. Les cartes bathymétriques ou «cartes marines», pratiques et facilement accessibles, sont cependant des documents limités dans le cadre d'un travail de comparaison de la morphologie des fonds. L'objet de cet article est de montrer l'intérêt de l'utilisation des minutes de bathymétrie dans l'étude de l'évolution des fonds marins. Ces documents présentent les sondes réelles du fond lors de la prise de mesure, corrigée en fonction du coefficient de marée.


L'acquisition des données

1. Extrait d'une minute (à gauche) et d'une carte bathymétrique (à droite)

Les minutes de bathymétrie sont des données brutes qui permettent d'établir les cartes marines. Elles recensent uniquement les sondes, sous forme de radiales, effectuées par les bateaux chargés des levés (fig.1). Elles sont réalisées par le SHOM, chargé de répertorier, avec différents partenaires comme les services maritimes ou les Ports autonomes, les levés de l'ensemble des côtes françaises, sous la forme de données numérisées (disponibles aujourd'hui depuis les années 1940) ou de données «papier» pour les années antérieures. À long terme, les cartes bathymétriques offrent des perspectives intéressantes de comparaison (Aernouts 2001) pour cerner une tendance d'évolution des fonds, mais les minutes de bathymétrie sont des documents plus fiables et plus précis. Leur acquisition et leur traitement restent cependant fastidieux, du moins pour les données anciennes, dont le grand format oblige à un long travail de numérisation.


La précision des données

2. Levés recensés par les minutes et les cartes bathymétriques

Si la carte et la minute de bathymétrie couvrent les mêmes espaces et sont toutes deux établies par le SHOM, leur conception est différente. La démolition des remparts commence en 1670. Ils sont remplacés par des boulevards, au-delà desquels il est interdit de construire pour faciliter les tirs d'artillerie. Sur la rive droite, ce sont les «grands boulevards»: Beaumarchais, des Filles du Calvaire, du Temple, etc., devenant des promenades très animées; sur la rive gauche, les «boulevards du Midi»: des Invalides, du Montparnasse, Saint-Jacques, de l'Hôpital; mais ils ont moins de succès.

La carte bathymétrique est un document nautique, avant tout destiné aux navigateurs; c'est un document simplifié, sur lequel ne figure qu'une partie des levés bathymétriques, afin d'en faciliter la lecture pour un usage courant, mais elle comporte en outre de nombreuses informations nautiques (réglementation nautique, principales isobathes, lieux de mouillage, etc.); les coordonnées géographiques y sont indiquées par rapport au système de référence ED50 (European Datum 50). Leur conversion en WGS84 (World Geographical System 84), système de référence mieux adapté au GPS (Global Position System) marin, est en cours.

La minute de bathymétrie est un document brut, épuré de toute information nautique. Seule la bathymétrie y est recensée et le référentiel choisi est le WGS84. Sur une zone de travail d'environ 20 km2, on dénombre environ 6 000 points de sonde, soit une mesure tous les 50 mètres, alors que sur une carte bathymétrique au 1/10 000 couvrant le même secteur, on ne compte approximativement que 500 points de mesure, soit environ une cote bathymétrique tous les 200 mètres (fig. 2). La précision des minutes de bathymétrie est évidemment bien plus grande. Face au port de Calais (SHOM, 1977), considérant les deux semis de levés pour un même secteur, le gain de précision peut être estimé à 8 mètres dans les secteurs où les fonds sont les plus mobiles comme les bancs pré-littoraux ou les chenaux de navigation régulièrement dragués.


3. Comparaison entre les cartes et les minutes de bathymétrie aux abords de Calais en 1977

La bathymétrie interpolée par le logiciel Surfer 8.0 à partir des cartes bathymétriques se confond à première vue avec celle qui est établie par le biais de la minute (fig. 3). En fait, les profils bathymétriques montrent des différences non négligeables entre les deux documents (fig.4). On note par exemple sur les minutes la présence de vagues de sable au sommet du banc côtier du riden de la Rade, dont l'existence est liée à l'action des courants de marée qui peuvent atteindre 2 nœuds dans ce secteur (SHOM, de Calais à Dunkerque, 6651P), alors que, sur le profil issu des cartes marines, ces figures sédimentaires ne sont pas visibles.


La compilation des levés

4. Comparaison entre les profils A et A'

5. Mosaïque des levés bathymétriques aux abords du port de Calais

Sur les cartes bathymétriques, les bancs prélittoraux, les chenaux d'accès aux ports soumis au dragage, font l'objet de réactualisations ponctuelles; mais les zones considérées comme peu évolutives (interdites à la navigation ou proches des petits-fonds) ne font pas l'objet de réactualisations (fig.4).

Ces cartes sont une mosaïque de plusieurs levés et ne représentent donc pas un état des fonds à un moment donné. La comparaison de la bathymétrie entre plusieurs dates n'est par conséquent pas possible pour certains secteurs. Par exemple, il est difficile de présenter une cartographie différentielle des fonds entre 1977 et 1997 aux abords de Calais car la carte bathymétrique de 1997 englobe une partie des levés de 1977. Cette carte différentielle indique par conséquent une apparente stabilité des fonds durant la période 1977-1997 (fig.5).

Pour le secteur allant du cap Gris Nez à la frontière belge sur près de 70 km, seules deux dates (1910 et 1977) permettent une comparaison fidèle.


Conclusion

L'utilisation des minutes de bathymétrie dans l'étude de l'évolution des fonds marins permet ainsi de limiter les marges d'erreurs et d'établir un état des fonds le plus près possible de la réalité pour un secteur donné à un moment donné. Néanmoins les cartes restent un bon indicateur de tendance d'évolution à long terme.

6. Limites des cartes bathymétriques: le tableau synthètise le détail des réactualisations entre 1977 et 1997, 1/10 000. La carte différentielle entre les levés de 1977 et 1997 montre la stabilité des fonds entre les deux dates.


Bibliographie:

AERNOUTS, D. (2001), Les effets de l'évolution morphologique des petits-fonds sur la réfraction des vagues à la côte aux abords du port de Calais (Nord-Pas-de-Calais), mémoire de DEA de 3ème cycle. Université du Littoral-Côte d'Opale, 83 p.

SHOM, Zone Calais Ecriture de sondes - Minute définitive n°1 76-13-4 (RR 77.1.6)

SHOM, Ouest de Calais Ecriture de sondes - Minute définitive n°1 76-13-3 (RR 77.1.5)

SHOM (1977), Rade de Calais 1/10000e

SHOM (1977), 3ème Edition Rade de Calais 1/10000e

SHOM (1997), Abords de Calais 1/15000e

SHOM, de Calais à Dunkerque. 1/43100e. n°6651P.

Avertissement et contacts
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