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Paléoclimats

Mesure du temps dans l'histoire de la Terre

En ces temps de changement climatique, de modélisation et de prospective, il est parfois bon de se reporter au passé de la planète afin de mieux asseoir les prévisions avancées. L’étude des paléoclimats, ou plutôt celle des indicateurs qui nous permettent de les reconstituer notamment en sédimentologie, fait l’objet du récent petit traité de Jean-François Deconinck publié chez Vuibert. S’il est vrai que le géographe est moins intéressé par les climats glaciaux ou torrides qui ont marqué un espace planétaire bien différent de l’actuel il y a quelques centaines de millions d’années, la présentation des oscillations récentes, depuis 10 000 ans (l’interglaciaire actuel, l’Holocène), concerne bien la planète telle que les hommes l’ont peuplée et continuent de l’aménager. L’auteur précise en effet d’entrée que, pour les paléoclimats, les échelles de temps vont de la centaine de millions d’années à celles de quelques générations humaines, comme nous le montre désormais l’exploitation des carottes glaciaires recueillies à proximité des pôles. C’est au XVIIIe siècle que Buffon avance l’hypothèse des changements climatiques du passé, qui devient une évidence au XIXe siècle avec les blocs erratiques d’Agassiz. Au siècle suivant, on en est au quantitatif avec notamment les mesures isotopiques, et on détermine des variations cycliques du climat influencées aussi bien par les fluctuations des paramètres de l’orbite terrestre que par l’activité solaire. S’y rajoutent, entre autres, les manifestations volcaniques (l’explosion du Pinatubo date de 1991) et, évidemment, les activités humaines dont on s’efforce de préciser l’importance. Il nous est bien indiqué que l’approche doit être aussi bien modélisatrice qu’empirique sur le terrain, pour déterminer le rôle respectif de tous les acteurs du système climatique listés dans l’ouvrage. Le chapitre 2 concernant les climats actuels et les grands événements tels que le Niño, puis le dernier, consacré aux «variations climatiques à haute fréquence» et aux changements abrupts du climat font le point sur les plus récentes connaissances d’un environnement climatique changeant auquel nos sociétés sont actuellement confrontées. Tout n’est pas expliqué, loin de là, mais la recherche avance avec la complexité de multiples acteurs: on apprécie notamment les passages touchant à l’influence de l’humidité et de la faiblesse de l’ensoleillement sur la croissance des glaces alors que la sécheresse et les forts contrastes thermiques jouent en sens contraire. Les «courts» événements Dansgaard-Oeschger et Heinrich montrent que  des réchauffements et des refroidissements de plusieurs degrés se sont produits naturellement en quelques décennies, dans un passé récent. Le réchauffement actuel coïncide avec une activité solaire en accroissement régulier, vraisemblablement exacerbée par des influences anthropiques dans une proportion qui reste encore à déterminer. Ce dense manuel, très riche, est d’une grande actualité.

Pierre Usselmann


DECONINCK Jean-François (2006). Paléoclimats, l’enregistrement des variations climatiques. Paris: Vuibert, Société Géologique de France, coll. «Interactions», 198 p. ISBN: 2-7117-5395-6