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La Corse et le tourisme 1755-1960

Ce livre accompagnait l’exposition consacrée à ce thème au Musée régional d’anthropologie de la Corse durant le second semestre 2006, dont les responsables scientifiques étaient Valérie Marchi, commissaire de l’exposition, et Marc Boyer, historien. Écrivains, historiens, ethnologues, juristes, économistes ou architectes ont été mis à contribution pour rédiger ce volumineux ouvrage, remarquablement illustré de photos, de tableaux, de plans, d’affiches, etc. Un «beau livre» qui doit devenir incontournable pour ceux qui s’intéressent à la Corse ou au tourisme. La première partie est consacrée aux origines du tourisme en Corse, à travers l’étude des voyageurs de l’Antiquité ou du Grand Tour. Si les mises en perspective, replaçant la Corse dans la dynamique touristique méditerranéenne, voire européenne, sont utiles, on regrettera une certaine confusion entre tourisme et voyages. Du coup, l’émergence du tourisme en Corse, dans les années 1860 à Ajaccio, n’est peut-être pas assez soulignée. On retrouve à l’origine de cette «station d’hiver» des personnages qui ont joué un rôle important sur la future Côte d’Azur, tel le docteur Henry Bennet (1816-1891), créateur de la station climatique et médicale de Menton. L’exemple ajaccien est largement développé ensuite, notamment sur le plan architectural avec une analyse du «quartier des Étrangers».

Si la question du regard, de l’imaginaire et des représentations est abondamment analysée, par le truchement de la peinture ou du cinéma, le géographe regrettera la faible analyse de la diffusion du tourisme en Corse. Hormis Ajaccio, les autres lieux touristiques corses ne sont abordés que brièvement; on ne sait pas grand-chose de la mise en tourisme de la montagne, car peu de chose nous est rapporté de la station d’été de Vizzavona, créée à la fin du XIXe siècle. Le géographe se lamentera également de la faiblesse de l’analyse du tourisme à l’époque contemporaine. On a l’impression que l’on a soigneusement cherché à éviter les sujets qui fâchent en s’arrêtant aux années 1960. Il n’aurait pas été inintéressant d’analyser la relation entre le développement du tourisme de masse et le réveil du nationalisme régional ou la criminalisation de l’économie touristique, avec l’«impôt révolutionnaire» et la mise en place d’un système mafieux prospérant sur la nouvelle économie touristique. Quelques photos de structures touristiques plastiquées ou de graffitis anti-touristiques auraient donné une image moins lénifiante du tourisme corse.

Jean-Christophe GAY

Collectif. (2006). La Corse et le tourisme, 1755-1960. Ajaccio: Albiana/Musée de la Corse, 496 p. ISBN: 2-84698-177-9. ISBN: 2-909703-20-7