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Un nouvel atlas du Brésil

«Deus é brasileiro», et le pays est «le paradis des cartographes», en voilà plus qu'il ne fallait pour produire un bel objet, dans la forme et dans le fond. Il présente un bilan daté, à la naissance du Brésil de Lula, sans se priver de quelques clins d'œils qui émaillent la démarche scientifique. Cartes et textes très clairs balancent, se complètent, résultat d'une série de collaborations croisées franco-brésiliennes. Fidèles à l'esprit de la collection, ils mettent l'accent sur les «dynamiques» et sur le «territoire», deux concepts qui reviennent constamment, largement justifiés. La bibliographie est alimentée régulièrement par les écrits des deux auteurs, depuis le premier Atlas chorématique du Brésil d'Hervé Théry (Fayard/RECLUS, 1986).

Laissons de côté les rubriques habituelles des géographes, attendues, présentes et regroupées en dix chapitres fouillés, pour d'autres choix de lectures, moins systématiques. La série «Le Brésil et le Monde» recense les échanges habituels mais prend en compte des variables inattendues, la place sur Internet, les échanges scientifiques et… le football, élément identitaire très fort. Les étapes de l'occupation du pays décomposent les cycles successifs, le système de la canne et donc la main-d'œuvre des esclaves africains, et donc le tabac comme objet de troc, et donc l'élevage de bœufs pour les moulins à sucre et donc les cultures vivrières pour la nourriture. Défilent bandeirantes, seringueiros, collecteurs de drogas do sertão, terras roxas du café. En cinq siècles, on passera des capitaineries héréditaires à une multiplication des municipes, deux en 1970 et cinquante-deux à la fin du siècle pour le Rondônia, par démembrements et conquêtes successives.

Retour dans l'inattendu, le relevé des noms attribués est chargé de symboles, en disant long sur la société responsable du choix. Tous les «Saint», parfois du jour de la fondation, les «José» et «Maria», «l'Ouest» qui signale le sens de la marche pionnière, les doublets ville de départ ville-fille, «Novo» ou «Nova», révélateurs des axes de poussée ou d'homonyme prestigieux.

À travers le jeu des toponymes, ces cartes sont susceptibles d'attirer vers elles des non spécialistes, hors du sérail. De même ensoleillement, évaporation, régime des vents élargissent le chapitre sur l'environnement, tout comme ces indices de «pression anthropique», urbaine, rurale, des cultures et de l'élevage.

Les cartes de la population vont jusqu'à la répartition des couleurs de peau dominantes, leur croisement avec les revenus permettent de dépasser la seule description. Les liaisons avec les ports français figurent.

À l'issue d'une conclusion riche et toute en nuances, on retiendra: «Parmi les puissances émergentes du début du XXIe siècle, le Brésil apparaît plus solide que d'autres… C'est encore l'Amérique, la vraie.»

Robert Ferras


H. THÉRY, N. APARECIDA DE MELLO (2004). Atlas du Brésil, 304 p., La Documentation française, collect. La dynamique des territoires. ISBN: 2-11-005563-4.