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Mutations et inerties spatiales dans le Royaume-Uni d’aujourd’hui

Peu à l’honneur dans la littérature géographique française de nos jours, le Royaume-Uni est au programme du dernier numéro de la revue Géocarrefour. Publié par l’association des Amis de la Revue de géographie de Lyon, avec le concours du CNRS, et des universités Lumière et Jean Moulin de Lyon et Jean Monnet de Saint-Étienne, ce numéro s’attache à analyser les structures et dynamiques socio-spatiales du Royaume-Uni d’aujourd’hui. Au cœur de la mondialisation, il fait en effet l’expérience de recompositions économiques, sociales et spatiales majeures. Une désindustrialisation brutalement accélérée par les bouleversements du thatchérisme a laissé place à une tertiarisation et à une polarisation du pays, ainsi qu’à une augmentation du niveau de vie moyen de sa population.

Profondément trans formé par ces évolutions que connaissent d’autres pays, le Royaume-Uni n’en reste pas moins un cas à part. C’est cette spécificité britannique, géographique mais aussi politique, que les treize auteurs, sous la houlette de Manuel Appert et John Tuppen, tentent avec succès de rendre compte.

Cet ouvrage est bien illustré : les graphiques et les cartes sont de qualité, comme cette représentation de l’accélération de la croissance de la population urbaine de l’Angleterre depuis 25 ans (p. 85). De même, la contribution photographique apportée par Manuel Appert rend la lecture plus aisée en faisant appel à la réalité concrète. On regrette l’absence d’une table des figures en fin de volume. Néanmoins, le lecteur appréciera d’avoir l’occasion, énigmatiquement si rare dans les ouvrages concernant la Grande-Bretagne, de voir associés les points de vue de spécialistes français du sujet, mais aussi britanniques (quatre articles, sur les dix composant le volume, sont en langue anglaise).

Enfin, si le sommaire de l’ouvrage peut paraître un brin dispersé au premier abord, il révèle au fil de la lecture une structure très élaborée. L’étude débute par une analyse de la division économique qui oppose le Grand Londres, entré à nouveau dans une phase de croissance urbaine après cinquante années de déclin démographique et économique, au «désert anglais» (D. Dorling). S’ensuit une évaluation des difficultés qui découlent de ces mutations, notamment les questions d’insécurité et les enjeux d’aménagement urbain auxquels sont confrontées les autorités locales.

Le champ est alors progressivement élargi, et l’analyse se penche sur le cas de la Northern Way, nouvelle politique territoriale travailliste visant à favoriser le développement économique du Nord de l’Angleterre. Enfin, le dernier article de l’ouvrage nous propose une étude de l’impact du processus de «dévolution» sur les cadres territoriaux, et ce notamment dans le domaine des transports. Si la structure de la revue fait montre d’une continuité évidente et appréciable dans la réflexion, il est à regretter que l’accent ait été exagérément mis sur Londres et l’Angleterre, au détriment des autres régions constituant le Royaume-Uni, contrairement à ce que laissait envisager le titre de l’ouvrage.

Malgré cet anglo-centrisme, ce nouveau numéro de Géocarrefour demeure d’une richesse et d’une diversité que le lecteur saura assurément apprécier. Il s’agit là d’un outil de réflexion et de travail indispensable pour quiconque souhaite comprendre les transformations qui parcourent la société britannique d’aujourd’hui.

Nathan Robinson Grison

APPERT M., TUPPEN J., dir. (2009). Mutations et inerties spatiales dans le Royaume-Uni d'aujourd'hui. Géocarrefour, vol. 83, 2/2008.