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Archaeology Data Service, un site au service des archéologues britanniques

La pratique de la fouille implique la destruction des données primaires que l’archéologie a pour but d’étudier. Il n’y a qu’un temps possible pour l’observation qui ne peut être répétée. La question de l’archivage et de l’accès aux données enregistrées lors de la fouille est donc cruciale.

Créé en 1996, Archaeology Data Service (ADS) est un centre de ressources numériques en archéologie pour la recherche et l’enseignement au Royaume-Uni. ADS offre un accès à des données originales au format numérique et en assure la conservation sur la longue durée. Il a aussi pour but de favoriser l’utilisation des données numériques en archéologie et le déploiement des techniques associées: on trouve sur le site des conseils et diverses ressources destinés à la communauté scientifique.

L’existence d’ADS repose sur un postulat qui relève de l’éthique professionnelle de la communauté archéologique: l’utilisation des données primaires doit être libre. Je ne suis pas certain que cette doctrine soit partagée par tous les archéologues français.

Hébergé par l’Université d’York, le site ADS a été fondé par un consortium comprenant le Council for British Archaeology, les universités de Birmingham, Bradford, Glasgow, Kent à Canterbury, Leicester, Newcastle, Oxford et bien sûr York. ADS comprend un comité consultatif composé de représentants de tous les secteurs de la discipline. Les principaux organismes archéologiques britanniques recommandent ou imposent que les données produites par les programmes qu'ils financent soient déposées sur ADS.

Page d’accueil du portail ADS (consulté le 25.01.2011)

Données disponibles

Les données déposées proviennent de travaux de terrain et d’études. Il s’agit des bases de données pouvant comprendre les enregistrements de fouilles, le mobilier archéologique, les images (photographies de structures et d’objets, photographies de sites, photographies aériennes, images de télédétection), les données numériques de localisation (topographie, GPS), les plans numérisés, les dessins de restitution, les sondages du sous-sol, les rapports d’analyse et de datation, les rapports de fouilles. Les jeux de données sont organisés en quatre collections:

Enseignement

Le volet enseignement d’Archaeology Data Service permet d’accéder librement à de nombreux cours en ligne. En outre, il contient une banque d’images, cataloguées et sélectionnables par un moteur de recherche, disponible pour l’enseignement et la recherche.

Musée archéologique de l’informatique

L’interface de recherche cartographique

ADS s’est aussi engagé dans la collecte de plateformes informatiques anciennes. L’objectif n’est pas uniquement de constituer un musée statique, mais aussi de mettre à disposition de la communauté un outil pour faciliter la récupération de données à partir des systèmes d’origine lorsque ceux-ci n’ont plus cours. La collection comprend des ordinateurs avec leurs périphériques, leurs systèmes d’exploitation et des logiciels. L’idée d’un musée de l’informatique est amusante car elle permet à chacun de se souvenir avec nostalgie de son premier ordinateur. Elle est ici transformée en un outil indispensable à la sauvegarde des données traitées avec ces premières machines. (Consultez)

Pour conclure

Le nombre d’intervenants dans le domaine de l’archéologie est souvent évoqué comme un obstacle, ou au moins un frein, au partage de données et de ressources. Pourtant le Royaume-Uni est confronté depuis bien plus longtemps que la France à la coexistence de multiples intervenants publics et privés en matière d’archéologie [1]. La complexité du système d’acteurs britannique n’a visiblement pas été un frein à la création d’une ressource centralisée. Force est de constater le retard considérable qu’accuse l’archéologie française (en dépit de sa défense légitime et argumentée de l’appartenance de l’archéologie à la sphère publique) en matière d’archivage et de mise à disposition — au moins à destination de la communauté scientifique — des données numériques. Je ne souhaite pas ouvrir ici le débat sur les raisons de cette situation, qui relève de la responsabilité collective de la communauté archéologique française, mais simplement attirer l’attention sur une ressource unique en archéologie. Archaeology Data Service constitue à mon sens un modèle de centre de ressources numériques. Les archéologues français feraient peut-être bien de s’en inspirer.

En France, la loi permettant l’agrément de sociétés privées pour l’exécution de fouilles date de 2003 seulement.