N°102

Un atlas pour comprendre l’espace mondial

La 5e édition de l’Atlas de la Mondialisation a été préparée par deux cartographes, deux politistes et une géographe. Les auteurs entendent analyser l’espace mondial en prenant en compte les effets de la diffusion d’une crise économique, financière et politique, mais également environnementale et sociale. Comme dans les dernières éditions [1], on y trouve un dossier inédit qui apporte un éclairage sur un pays particulier: cette fois-ci la Russie, dont l’évolution est analysée au prisme de la problématique de la mondialisation (effets du passage à l’économie de marché, rôle de la Russie dans le jeu mondial actuel).

Outre ce dossier «Russie», l’ouvrage est organisé en cinq chapitres transversaux. Les deux premiers chapitres — «Des espaces contrastés» et «Les acteurs transnationaux» — sont assez classiques. Les suivants — «Quêtes d’allégeance», «Paix et guerres», «Régulations durables» — sont plus innovants. On apprécie la pertinence des textes d’ouverture des chapitres. À ces chapitres de fond s’ajoutent deux «clés de lecture» en début et en fin d’ouvrage. La première propose une révision de l’ensemble des principes de base de la réalisation cartographique (choix d’un fond, discrétisation, sémiologie). On peut se demander si ces précisions sont vraiment utiles, sauf pour des lecteurs peu familiers de la conception ou du maniement des cartes. La seconde clé de lecture est constituée d’un lexique bien conçu.

Chaque chapitre est découpé en thèmes présentés chacun en une double page. Cette présentation, fréquente dans les manuels scolaires, permet un emploi facile des planches dans un contexte d’enseignement. L’atlas devient ainsi une véritable boîte à outils de la mondialisation: mots clés, renvois en couleurs, mode d’emploi des cartes, fonds de cartes, lexique indexé, bibliographie, lien Internet, explications des photos choisies, graphiques et cartes accompagnent des textes courts. La circulation dans les contenus de l’atlas est aisée.

Que dire de la qualité et de l’intérêt des 147 cartes et graphiques présentés, en général sur une demi-page? L’iconographie n’est pas toujours très innovante. On trouve peu de cartographies qui bouleversent les visualisations traditionnelles: quelques fonds de carte polaires permettent d’aborder les dynamiques de la population (p. 28) ou du commerce (p. 99 et 106, 131) ou du sport (p. 77) d’une manière un peu renouvelée. Mais, on ne trouvera aucune transformation par anamorphose, par exemple, qui aurait permis, dans certains cas, de mieux rendre compte des effectifs en jeu. Une seule carte (p. 66) est vraiment originale dans sa présentation, par l’utilisation d’une projection de Bartholomew.

En résumé, les cartes thématiques sont de bonne qualité, mais souvent largement connues, car une bonne part de cette production de l’Atelier de cartographie de Sciences Po avait été déjà largement diffusée antérieurement sur d’autres supports. Malgré les efforts des auteurs, les cartes ne sont pas toujours à la hauteur de l’ambition initiale affichée, qui est de dépasser l’échelle des États (et ce n’est pas en effaçant les tracés des frontières sur les cartes que l’on masque le traitement des données statistiques par États). Finalement, le point fort de cet atlas n’est pas tant son contenu cartographique que ses textes, qui questionnent la mondialisation sous un angle original: celui de la remise en cause d’une conception trop largement basée sur les États-nations et leurs territoires.

Référence de l’ouvrage

DURAND M.-F., COPINSCHI P., MARTIN B., MITRANO P., PLACIDI-FROT D. (2010). Atlas de la Mondialisation – Comprendre l’espace mondial contemporain. Paris: Les Presses de Sciences Po,183 p. ISBN: 978-2-7246-1170-0

La Chine avait fait l’objet d’un dossier en 2008, puis le Brésil en 2009