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Inégalités sociales au Brésil

Le PNUD (Programme des Nations unies pour le développement) publie régulièrement pour tous les pays du monde un IDH (indice de développement humain) calculé de façon à prendre en compte des éléments que le seul PNB ne permettait pas de saisir, comme l’éducation ou la santé. En septembre 1998, il a publié sur cédérom un travail similaire réalisé par la Fondation João Pinheiro, de Belo Horizonte, pour tous les municípios (communes) du Brésil, pour les années 1970, 1980 et 1991 (date des trois derniers recensements). En 2002, le même travail a été refait par l’IPEA pour l’année 2000.

1. Indice de développement humain au Brésil en 2000

La carte 1 construite à partir de l’IDH, à l’échelle municipale et pour l’année 2000, montre bien sûr la prédominance du Centre-Sud, mais aussi que de puissantes dynamiques territoriales sont à l’œuvre dans le pays, car certaines régions ont connu de nets progrès, par rapport à 1998, alors que d’autres stagnaient. Parmi les progressions, la plus remarquable est celle du Centre-Ouest, et plus particulièrement du Mato Grosso, où l’arrivée de colons venus du Sud a fait progresser sensiblement l’IDH des municípios où ils se sont installés. Certains d’entre eux ont pu s’enrichir, ou du moins devenir les plus riches habitants de ces régions pionnières, les plus éduqués aussi et ceux qui ont les meilleures chances de survie, tous éléments qui comptent dans la confection de l’IDH. Tout se passe en fait comme s’ils transportaient avec eux leurs indices élevés, en maintenant dans les régions pionnières où ils s’installent les comportements sanitaires, scolaires et culturels de leurs régions d’origine. À l’inverse, on note les mauvais résultats du Centre du Paraná et du Sud de São Paulo, qui constituent les seules exceptions dans le bloc Sud-Sudeste. En dehors d’elles, les régions déprimées restent, aujourd’hui comme naguère, la haute Amazonie et le Nordeste, séparés désormais par un coin qui avance vers le nord, marque d’une progression des axes de modernisation économique et sociale (du moins ceux que prend en compte l’IDH), déjà évidente dans le Mato Grosso et aussi sensible dans le Pará, le Roraima et l’Amapá.

2. Évolution de l'IDH: 1970-1991 3. Évolution de l'IDH: 1991-2000

Si, au-delà de cette photographie instantanée, on s’attache maintenant à la dynamique de l’IDH dans le temps, on constate des mouvements différents. Entre 1970 et 1991, les régions qui ont connu les plus fortes progressions de leur IDH sont justement celles qui ont été marquées par la modernisation agricole (Ouest de São Paulo, Triângulo mineiro, Sud du Goiás) et la progression des fronts pionniers (axe de Belém-Brasília et Rondônia). Au cours de cette période, le Nordeste a stagné, à l’exception de ses capitales et de petites régions de l’intérieur du Pernambuco et de l’ensemble Ceará-Rio Grande do Norte, qui se détachent bien que les données aient été lissées pour éviter de souligner des phénomènes trop locaux.

Pour la période 1991-2000 en revanche, c’est cette fois nettement le Nordeste qui a progressé. Même si la progression est évidemment plus facile, d’un point de vue purement arithmétique, à partir de ses niveaux faibles qu’à partir des niveaux déjà élevés du Sud et du Sudeste, la rupture de tendance est évidente et mérite d’être soulignée. Elle indique que, si le Nordeste souffre toujours de déficits sociaux qui justifient amplement une vigoureuse action gouvernementale, il existe une amorce de mouvement de rattrapage, engagée sous les deux mandats de Fernando Henrique Cardoso.

Comme les cartes de PIB et de revenus montrent que le Nordeste est encore très en deçà des autres régions d’un point de vue économique et financier, la progression de l’IDH dans la dernière période est très probablement due à des progrès obtenus sur le plan social, notamment en matière d’éducation, un facteur qui pèse lourd dans la confection de l’IDH. Des efforts ont été faits dans ce domaine, c’est ce qui explique en partie les progrès observés, mais il reste beaucoup à faire, et donc d’amples marges de progression.

Extrait de THÉRY Hervé, MELLO Nelly Aparecida de (2004), Atlas du Brésil, 302 p., 452 cartes et graphiques, 22 tableaux. Paris: CNRS-GDR Libergéo/La Documentation française, coll. «Dynamiques du territoire n° 22».