N° 88 (4-2007)
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Exode urbain des jeunes couples en Loire-Atlantique
Université de Nantes DR IGARUN: Institut de Géographie et d'Aménagement Régional de l'Université de Nantes |
Introduction «Une classe sauvage au cœur de Nantes», titre le quotidien Ouest-France le 30 avril 1992. Par une manifestation «bon enfant» mais spectaculaire, avec pupitres et tableau noir installés sur la place du Commerce, les syndicats d’enseignants entendent opposer un «front du refus» à la suppression de postes et disent: «Non à la mort du secteur rural», un secteur où menacent les fermetures de classes pour cause d’effectifs en baisse. Dix ans plus tard, au printemps 2002, plusieurs milliers de professeurs des écoles défilent dans les rues de la ville, à la pointe du mouvement national pour la création de postes budgétaires en grand nombre, compte tenu d’un nécessaire effet de rattrapage et de l’évolution démographique, y compris en certaines zones rurales. Les besoins évalués à plus de 400 postes font du département l’un des plus gros demandeurs. Au final sera acquise une dotation exceptionnelle de 380 postes échelonnée sur trois ans, de 2002 à 2004 (1). Ces actions revendicatives s’inscrivent dans un contexte d’évolutions beaucoup plus profondes. L’INSEE crédite la Loire-Atlantique d’une population de 1,2 million d’habitants en 2005, soit un gain de 200 000 personnes en 20 ans. Ici comme en d’autres départements du littoral atlantique le nombre d’enfants scolarisés dans le premier degré croît nettement: + 8,4% de la rentrée 1999 à la rentrée 2006. Ce dans les deux secteurs: + 8,9% dans le public, + 7,4% dans le privé. Jeunesse en campagne, une mesure de l’étalement urbain Chaque année l’Éducation nationale doit adapter la carte scolaire aux nouveaux flux d’élèves. Combiné ou non au décompte précis des effectifs, le simple pointage du solde positif des ouvertures et fermetures de classes par commune est un marqueur clair et symbolique d’une dynamique démographique révélatrice de profonds bouleversements territoriaux en cours ces huit dernières années. Bouleversements étroitement liés au développement métropolitain, suivi d’effets plus complexes qu’il n’y paraît au premier abord (cartes 1 et 2) (2). L’extension ou la création d’écoles primaires: «une demande grandissante en Loire-Atlantique» C’est le constat du Conseil d’architecture, d’urbanisme et de l’environnement (CAUE44, 2002). En sept ans, une huitaine de communes battent les records de croissance du nombre d’élèves et d’ouvertures de classes (+ 245 enfants et + 9 classes au minimum). Ce sont le plus souvent, mais pas toujours, des chefs-lieux de canton sis en toutes directions: Saint-André-des-Eaux, à l’ouest en Pays guérandais, Savenay, à la croisée des grands axes vers Vannes et Saint-Nazaire, Héric, sur la route de Rennes au nord, Ligné, à l’est dans le Pays d’Ancenis, La Chapelle-Heulin, près de Vallet dans le Vignoble, Geneston, au sud, et Sainte-Pazanne, dans le Pays de Retz, record absolu (+ 367 élèves et + 13 classes). La progression s’est faite assez régulièrement.
Les mutations marquent d’autant plus les esprits qu’elles se concrétisent dans le paysage. De nouveaux groupes scolaires sortent de terre: à Treillières par exemple en 2001, Casson en 2002, Saint-Philbert-de-Grand-Lieu en 2003, soit entre 13 et 23 km du nord au sud de Nantes. Ailleurs, des écoles rouvrent leurs portes avec de plus modestes effectifs en des locaux neufs ou rénovés. D’autant plus spectaculaire est la rentrée 2004 à La Limouzinière où «la communale», fermée plus de soixante ans, accueille d’emblée les enfants en six classes. Bien souvent la renaissance de l’école publique prend valeur de symbole: un symbole de vitalité démographique et de libre choix de l’enseignement laïque et gratuit au lieu de résidence. C’est une réalisation coûteuse, une lourde charge pour de petits villages. En 2001, le Conseil général double le plafond de ses subventions et crée un fonds départemental pour aider les communes de moins de 2 500 habitants (3). Entre 2000 et 2007, neuf communes retrouvent un service public disparu depuis six décennies voire plus dans le Pays de Retz, moins de deux à cinq dans le Castelbriantais et le Pays d’Ancenis. Ces réouvertures interviennent à la suite d’actions diverses, notamment de parents d’élèves pour partie nouveaux venus et scolarisés parfois en grand nombre dans les écoles publiques des communes voisines. Des manifestations ont animé les bourgs de Rougé et de Moisdon-la-Rivière. À La Limouzinière, «la création de l’école publique s’est faite sans heurts». À Chauvé, le maire souhaite «que les deux écoles vivent en harmonie». De même, le maire de Paulx déclare: «Nous ne construisons pas une école publique au détriment de l’école privée. La volonté municipale est de permettre la liberté de choix dans les deux sens au profit de l’enfant» (Ouest-France, 3 septembre 2004; 23 septembre 2006). De fait, l’installation, en 2002, de l’école publique dans les locaux de l’école privée fermée l’été précédent à Pannecé reste un cas extrême. En nombre de lieux à forte croissance démographique la fréquentation des deux écoles progresse en proportion variable. Les équipements périscolaires ouverts à tous se multiplient. Parfois les enfants partagent la même cantine. Globalement, à l’échelle départementale, la part du privé demeure très forte, quasi identique en 1999 et 2006, soit 35% des effectifs de l’enseignement primaire. Exclure les villes de Nantes et de Saint-Nazaire élève le pourcentage de 2 points sans modifier un taux d’évolution infime (- 0,5 point). À la rentrée 2007, les deux secteurs coexistent presque partout, à l’exception de 24 communes sans école privée sous contrat. Quant au service public, il fait défaut en 23 communes toujours dépourvues d’école primaire contre une quarantaine au milieu des années 1960. Une dynamique sans frontière En sept ans, l’installation des jeunes ménages dans l’orbite de la ville-centre atteint une particulière densité à l’est d’une ligne route de Rennes-lac de Grand-Lieu, en passant par les sites attrayants des rives de la Loire et du Vignoble. La proximité d’une voie rapide joue un rôle majeur, bien illustré par le chapelet de signes positifs égrenés au long de la RN 137 en direction de Rennes. Touchée plus tôt par le phénomène aux abords de la ville, la route de Vannes apparaît aujourd’hui moins concernée jusqu’à hauteur de Savenay, à mi-chemin entre les bassins d’emploi de Nantes et de Saint-Nazaire. De jeunes couples, souvent travailleurs de la zone industrialo-portuaire, s’installent également à l’ouest, entre Brière et littoral, mais hors des stations touristiques trop onéreuses. Le grand pont sur l’estuaire facilite résidence et relations sud-nord entre les deux rives. La vague de jeunes migrants nantais gagne elle aussi le Pays de Retz où s’offre encore en certains lieux la possibilité d’acquérir une maison individuelle à meilleur prix. La récente amélioration de la desserte ferroviaire entre Nantes et Pornic renforce l’attraction. En contrepoint, Nantes et sa première couronne concentrent l’essentiel des pertes d’effectifs dans un rayon de 10 km. De même, Saint-Nazaire accuse un solde négatif, tout comme certaines stations littorales de la presqu’île guérandaise et Pornic où s’installent nombre de personnes âgées. Dans le Nord du département, héritier d’un long passé de faiblesse démographique, un léger regain de jeunesse touche les milieux ruraux, mais la tendance n’atteint pas encore la ville de Châteaubriant. L’étalement urbain franchit les limites de l’aire urbaine nantaise où travaillent au moins 40% des actifs résidant dans chacune des communes incluses dans ce périmètre en 1999. Le bassin de vie déterminé par l’AURAN en 2006 (4) comble les échancrures du tracé précédent au sud du fleuve et se dilate beaucoup au nord/nord-ouest, de manière continue au-delà du cercle des 30 km. La distance-temps au centre-ville donne d’intéressants repères dans la mesure où s’y trouvent réunis le plus grand nombre d’activités et de services, fréquentés de manière exceptionnelle ou non. En réalité, les trajets domicile-travail au quotidien sont tantôt plus courts en raison de la multiplicité des zones d’activités dans la première couronne et au-delà, tantôt plus longs pour de multiples raisons, en particulier la forte proportion de personnes qui résident au sud du fleuve mais travaillent au nord. Sans compter les aléas de circulation.
Pour offrir une alternative au trafic routier engorgé et polluant, pour améliorer les dessertes périurbaines et régionales, la Communauté urbaine de Nantes (CUN), le Conseil général et la Région veulent exploiter au mieux une étoile ferroviaire amputée dans le passé de quelques branches locales. La ligne Nantes-Angers est surchargée; Nantes-Clisson aussi. Nantes-Saint-Nazaire bénéficie désormais d’une liaison cadencée. Quant à la ligne Nantes-Sainte-Pazanne, avec bifurcation vers Pornic et Saint-Gilles-Croix-de-Vie, son succès spectaculaire depuis sa réouverture au trafic de voyageurs, en 2001, décide le Conseil régional à programmer sa modernisation afin d’augmenter la fréquence des trains, en premier lieu jusqu’à Sainte-Pazanne en 2009. C’est là un cas exemplaire de croissance concomitante du nombre de «navetteurs» et du nombre d’élèves à l’école primaire. Tous les points du territoire n’offrent pas la même simplicité apparente d’évolution. En marche depuis trois décennies, le processus s’emballe Aujourd’hui, selon l’AURAN, 763 000 personnes vivent dans l’aire urbaine de Nantes, 300 000 d’entre elles travaillent sur le territoire de Nantes Métropole et une sur quatre habite à l’extérieur de l’agglomération. En trente ans, le nombre de travailleurs a été multiplié par 1,4 et celui des migrants par 2,2. Fait nouveau, le gain de population dans les 24 communes de Nantes Métropole pour la dernière période 1999-2006 est légèrement inférieur à l’apport des 58 autres communes (+ 25 300 habitants contre + 26 400). Dans ce périmètre global, la surface urbanisée a été multipliée par trois en quarante ans. Entre 2000 et 2005, 62% des terrains à bâtir urbanisés pour l’habitat — soit 1 050 hectares sur 1 720 — ont été consacrés à la construction de maisons hors agglomération. Dans le même temps, le problème du logement sur le territoire métropolitain ne cesse de s’aggraver pour les personnes de condition modeste. Depuis 1996, la flambée des prix de l’immobilier continue: + 11% par an, +12% depuis 2003. Le revenu des ménages ne suit pas (+ 3,3% par an) (Auran, 2007; Observatoire…, 2006). Le nerf de la guerre (carte 3) Dans la région Bretagne analysée par les Notaires de l’Ouest (5), la Loire-Atlantique demeure le département le plus onéreux en 2005, aussi bien pour les appartements et les maisons anciennes que pour les terrains à bâtir. La montée des prix ces dernières années comble un certain retard. En quatre ans, les terrains à bâtir accusent une hausse de 57%, les maisons anciennes de 56% et les appartements de 61%. Si Rennes affiche des prix de maisons anciennes plus élevés, Nantes s’inscrit en tête des appartements neufs, et anciens depuis peu. Aux facteurs généraux de la flambée des prix (6) s’ajoute localement la venue de «nouveaux Nantais», pour partie Franciliens, migrants dotés de bons revenus dans une ville où les emplois de cadres, y compris de haut niveau, progressent avec le développement des fonctions métropolitaines.
Quoique le jeu des moyennes — des prix de vente, des secteurs notariaux — atténue les disparités, l’observation à l’échelle d’une dizaine de divisions territoriales donne bien les grandes lignes de la situation. Le cas extrême de Nantes excepté, plusieurs groupes se distinguent en fonction des prix du marché et du profil social des acquéreurs de terrains à bâtir, davantage recherchés par les moins de 40 ans (66% contre 54% des maisons anciennes et 27% des logements anciens). Au nord de la Loire, trois secteurs affichent des prix du foncier globalement inférieurs de 30 à 40% à la moyenne départementale. Dans la région nazairienne, les couches populaires réalisent plus d’un achat sur deux de terrains à bâtir. La place des employés (20%) et des retraités (10%) distingue la Carene — Saint-Nazaire inclus — de son arrière-pays d’Herbignac-Pontchâteau, marqué par la présence maximale des ouvriers (38% contre 30%). Là aussi, dans une quinzaine de communes groupées de l’Est briéron aux alentours de Pontchâteau, 87% du millier de constructions réalisées entre 2000 et 2003 ont bénéficié d’un prêt à taux zéro (PTZ) (Conseil général, 2006). Quant au secteur de Blain-Châteaubriant, on y voit à parts égales (30%) ouvriers et professions intermédiaires sur un territoire hétérogène et très étendu, des marges du périurbain nantais au rural profond en passant par divers bourgs et petites villes. À titre d’exemple, à une quarantaine de kilomètres de Nantes, dans le canton de Nozay traversé par la route de Rennes, le taux de PTZ excède les 80%, voire bien souvent 88%, à l’exception du chef-lieu. Grâce à des enquêtes fines, menées entre 2000 et 2005 auprès d’une population «issue pour l’essentiel des classes moyennes», on sait aussi qu’une part notable des «nouveaux» habitants — de jeunes couples en majorité — entretient des liens anciens avec le milieu local. Beaucoup ont grandi chez des parents propriétaires en des lieux plus ou moins proches de leur résidence actuelle. Partis à l’âge adulte, quatre sur dix reviennent en direct de l’agglomération nantaise où près d’un actif sur deux travaille toujours (Jousseaume, Madoré, 2007). Au-delà de la seconde couronne nantaise (selon le zonage notarial), les prix restent de 10 à 20% inférieurs au prix moyen du foncier en Loire-Atlantique, voire de 25% pour les maisons anciennes. La diversité sociale grandit, moins sans doute en Pays de Retz, très recherché par les ouvriers et les employés, que dans les secteurs de Savenay, d’Ancenis et du Vignoble où, sur le marché des terrains à bâtir, les professions intermédiaires surpassent les ouvriers, toujours présents mais en moindre part (32 à 37% contre 20 à 25%). Globalement, populations modestes et populations relativement aisées s’équilibrent, sans que le poids des professions libérales et cadres supérieurs atteigne encore le taux départemental; toutefois, Savenay s’en approche pour les achats de maisons (1 sur 5) et le Vignoble pour les terrains (12%). Les pôles d’attractivité majeure les plus onéreux — la capitale, sa proche banlieue et le littoral — captent les acheteurs dotés de meilleurs revenus: professions libérales et cadres supérieurs partout; artisans et commerçants sur un littoral prisé plus encore par les retraités. Un éventail de prix relativement moins serré vaut à la Côte de Jade une forte surreprésentation de retraités de conditions diverses tandis que les Franciliens investissent davantage le marché sur la Côte d’Amour (22% des maisons anciennes). Certains lieux plus abordables de la Communauté urbaine de Nantes (CUN) ou de la deuxième couronne permettent encore aux actifs des professions intermédiaires de réaliser, au minimum, un tiers des acquisitions des maisons anciennes, comme des terrains à bâtir. En six ans, la flambée des prix a touché presque tous les territoires. Si l’achat d’un terrain à bâtir dans l’arrière-pays nazairien ou le secteur d’Ancenis peut encore revenir 50 à 60% moins cher que dans la CUN, les prix ont néanmoins doublé au minimum en cette période. Cependant, le poids des jeunes acquéreurs — moins de quarante ans — ne se dément pas: deux achats de terrains sur trois, 54% des maisons anciennes. Au prix, il est vrai d’un lourd endettement sur une longue période pour nombre d’entre eux. À l’exception du littoral et d’une présence relativement moins grande dans les agglomérations de Nantes et de Saint-Nazaire, tous les secteurs connaissent cette très forte dominante, maximale pour les terrains à bâtir dans le secteur Herbignac-Pontchâteau au nord et dans le Vignoble au sud, deux territoires aux profils sociaux très distincts. Face au problème essentiel de la pression foncière et d’une envolée des prix de l’immobilier en pays nantais, comme à l’échelle nationale, toujours inquiétante malgré des signes récents d’accalmie, des voix s’élèvent de divers horizons depuis plusieurs années pour suggérer des mesures aptes à freiner la spéculation foncière. Au plan local, élus ou géographe s’expriment avec force dans le dossier consacré à l’étalement urbain publié dans la revue Place publique en septembre 2007. Pour Jacques Floch, président de l’AURAN et ancien député-maire socialiste de Rezé, la puissance publique peut stabiliser le marché en acquérant des terrains quand le marché s’emballe et mettre ainsi en place des zones d’aménagement différé (ZAD). Outre l’usage plus fréquent du droit de préemption, André Trillard, président du Conseil général de 2001 à 2004 et sénateur UMP de Loire-Atlantique, préconise, pour casser la spéculation, l’instauration de plans d’urbanisme pluriannuels sur des zones déterminées, plans qui fixeraient le nombre de permis de construire en fonction de la «capacité d’absorption [de la commune] sur les plans économique, foncier, social». Quant au géographe Jean Renard, il réitère vivement ses critiques et propositions: «Si l’on entend économiser le foncier, ralentir la consommation d’espace, délimiter des périmètres agricoles inconstructibles, protéger les espaces naturels, il faut se doter d’un outil de maîtrise du foncier. Ce dernier existe, il s’agit de mutualiser les plus-values afin de briser la spéculation foncière. Aura-t-on le courage de l’appliquer?» (Renard, 2007). Le passé recomposé (carte 4) L’actuelle phase de diffusion urbaine en territoire rural s’inscrit dans un processus en marche depuis les années 1960, processus analysé et décrit en profondeur par Nicole Croix et Jean Renard dès 1989: «Ainsi en l’espace d’une génération, la ville a largement débordé sur les campagnes voisines et une nouvelle organisation spatiale est née, caractérisée par la mobilité des populations». La date d’inversion du solde migratoire, l’origine géographique des nouveaux habitants, le changement de rythme des constructions neuves permettent déjà de déterminer trois couronnes périurbaines parties prenantes d’un ensemble en expansion que les auteurs proposent d’appeler Grand Nantes, «dans la mesure où les différentes communes fonctionnent en un système commandé par le fait urbain» (Croix, Renard, 1990; Renard et al., 1990). Ces dernières années, le processus s’emballe pour des raisons déjà évoquées: dynamique économique et démographique accélérée, dessertes rapides, routières ou ferroviaires, multipliées et, surtout, flambée des prix du foncier et de l’immobilier sans précédent, avec, conjointement en milieu urbain, une grave pénurie de logements accessibles aux revenus modestes. Le phénomène revêt un aspect social plus visible et préoccupant qu’auparavant. Parmi les décisions de vivre à la campagne, la part de «choix contraints» augmente, ou bien de «choix semi-contraints» quand le retour aux sources de l’enfance coïncide avec un moindre coût d’installation et des facilités d’intégration ou de vie au quotidien, compensant l’éloignement du lieu de travail.
Une petite commune située à une vingtaine de kilomètres au nord de Nantes offre un bon exemple de révolution démographique accélérée ces dernières années. Casson franchit aujourd’hui le seuil des 2 000 habitants grâce à un gain d’une centaine d’habitants par an en moyenne depuis le début du siècle et un taux-record de logements neufs entre 1999 et 2004 (+ 7,7% par an). Les prémices de la métamorphose périurbaine apparaissent avec les premiers lotissements autorisés en 1978, puis la réouverture de l’école publique dans les années 1980, peu après la création du Hameau du Galichet (25 lots). Une dizaine d’opérations de petite taille (7 à 23 lots chacune) s’échelonnent sur une dizaine d’années, moitié avant, moitié après l’opération majeure de La Chesnaie en 2001-2002: 94 pavillons sur 11 hectares. Des terres bien groupées, issues pour partie, directement ou indirectement, d’une grande propriété nobiliaire, ont favorisé ces constructions à proximité du bourg. Les acheteurs, jeunes couples en majorité de 30 à 35 ans, viennent de Nantes ou des communes voisines et travaillent dans l’agglomération. Afin de ne pas accroître les frais d’équipement et de conserver un cadre de vie agréable, la municipalité limite désormais la construction à 20 logements par an en moyenne (7). Nombre de communes connaissent ces changements de rythme dans un phénomène de croissance très varié dans le détail. Désormais, les flux migratoires et l’étalement urbain associé touchent la plus grande partie du territoire départemental et le débordent en certains points. Ces ondes chevauchantes anciennes et nouvelles se propagent selon une grande complexité. Les structures foncières, les politiques municipales diffèrent d’un lieu à l’autre. Cependant, à l’échelle des communes entières, la carte des revenus des ménages donne l’image d’une assez claire ordonnance, à la fois facteur et résultante de l’évolution sociale, en raison du jeu essentiel des coûts de l’immobilier modulé par le poids du passé. Ainsi la morphologie primordiale et l’histoire économique dessinent-elles encore une brèche singulière dans le modèle radioconcentrique récemment généré par l’accroissement de la mobilité et de la distance au centre-ville. Si, outre le littoral, les revenus au minimum égaux au revenu médian national se concentrent autour de Nantes, dans un rayon d’une vingtaine de kilomètres au nord de la Loire et d’une quinzaine au sud, le peuplement le plus aisé privilégie par étapes successives, depuis plus de trente ans, les sites agréables à l’est d’une diagonale nord-ouest/sud-est. De la vallée du Cens puis de l’Erdre, la conquête progresse aujourd’hui sur les bords de Sèvre et, ponctuellement, de la Loire. Depuis 1990-1995, des couches moyennes de population investissent la périphérie ouest, notamment en direction du lac de Grand-Lieu. Pour autant, le cercle ne se referme pas. L’ancienne dominante ouvrière de la cité industrielle et portuaire se dilue dans un peuplement plus diversifié, mais laisse encore sa trace sous forme de valeur médiane moindre des revenus au sein de l’agglomération. Pour combien de temps? Le programme d’aménagement «Rives de Loire» et des passages nord-sud facilités par bac et navibus renforcent l’attractivité de ces communes de fond d’estuaire. Leur position sur l’échelle des prix de l’immobilier aussi. Le Nord du département présente le seul ensemble quasi uniforme de faibles revenus, dans un contexte rural fragile et trop peu pourvu en ateliers artisanaux ou petites entreprises industrielles, à la différence du Pays d’Ancenis et du Vignoble, proche du Choletais. Bien souvent, six foyers sur dix, voire sept, ne sont pas imposés. Ailleurs, à l’exception du littoral, les niveaux de vie saisis au travers du revenu par unité de consommation (RUC) se déclinent en étroite relation avec les vagues de migrants salariés et leur statut social. Les valeurs de peu inférieures à la médiane nationale soulignent la coalescence des aires d’attraction nantaise et nazairienne, entre estuaire et route de Vannes, avec point de jonction à Savenay. Ce niveau n’apparaît pas à moins de 20 km de distance au nord du centre-ville nantais, et 15 km au sud selon le décalage habituel. Hormis le Vignoble, la situation se dégrade le plus souvent aux abords des 30 km. Dans un avenir proche ou lointain, cette géographie fiscale, traduction des structures héritées comme des recompositions sociales en cours, est promise à d’autres bouleversements. Selon Jean Renard (2007), «Le nouvel espace résidentiel de la métropole sera demain le pays de Retz, situé entre agglomération et littoral, dans une position idéale pour le cadre de vie des périurbains». Ce processus-là est déjà bien enclenché, d’autant que le Nord, désenclavé grâce à la gratuité du pont de Saint-Nazaire et à la ligne ferroviaire Nantes-Pornic, participe de deux bassins d’emplois. À plus long terme sans doute, l’angle mort du Castelbriantais pourrait connaître une singulière évolution. La ligne Nantes-Châteaubriant, fermée au trafic de voyageurs depuis 1980, devrait renaître sous forme de branche d’étoile ferroviaire empruntée par un tram-train sur 64 km à l’horizon 2012. La desserte à mi-parcours jusqu’à Nort-sur-Erdre devrait fonctionner dès 2009-2010. Dans l’axe des équipements universitaires, la route de Rennes peut aussi canaliser davantage l’installation de couples ayant fonction de cadres dans les services ou la recherche, l’un à Rennes, l’autre à Nantes. Enfin, à plus long terme, de profonds remaniements suivront, s’ils ne les précèdent en partie, les projets aéroportuaires à Notre-Dame-des-Landes et peut-être d’un second périphérique, encore mal défini et contesté, avec nouveau franchissement de la Loire d’ici un quart de siècle. Les esquisses de cet anneau englobent précisément des lieux où, après la multiplication des classes en primaire vient la nécessaire ouverture d’un collège. Les enfants grandissent et la périurbanisation entre dans une seconde phase de croissance. Complexité de la dynamique nantaise: le marqueur scolaire Les ouvertures d’établissements scolaires, l’observation des flux d’élèves donnent des repères chronologiques fins sur les mutations périurbaines. Ce sont autant de signes d’un renouvellement urbain amorcé au sein d’une agglomération où l’exil de plus en plus lointain de jeunes couples de modeste condition est un problème pour les collectivités locales. Sans analyser les faits en profondeur — ce n’est pas l’objet de ces lignes —, on gardera cependant à l’esprit deux caractères spécifiques, sans relation entre eux, mais susceptibles de rendre délicate l’interprétation de certains faits et la comparaison avec d’autres lieux. Les communes de l’Ouest de la France ont un vaste territoire qui n’évolue pas en tous points au même rythme, voire connaît simultanément des phases contraires. Par ailleurs, la présence d’un enseignement catholique, très bien implanté de longue date, introduit un élément important dans le développement ou la création de nouveaux établissements par le jeu des stratégies respectives des deux secteurs, public et privé. Dans l’aire urbaine, le rythme d’ouverture des collèges s’accélère (carte 5) En dix ans, de 1990 à 1999, trois nouveaux collèges ouvrent leurs portes en Loire-Atlantique: un en Pays guérandais, deux dans la périphérie nantaise. Dans un moindre laps de temps, entre les rentrées 2001 et 2007, six collèges accueillent de nouveaux flux, tous situés dans l’aire urbaine. Le Conseil général adopte en 2005 le programme «Dix collèges en dix ans». Un objectif qui englobe création de nouveaux établissements et reconstruction d’anciens collèges, solution préférée à la rénovation. Dans la même perspective, suit en 2006 un Schéma départemental des collèges qui prend également en compte la question des transports et de la carte scolaire (Conseil général, 2006).
Ces ouvertures récentes ne concernent pas la banlieue ouest, conquise de plus longue date. À proximité du premier cercle, dans un rayon de 10 à 15 km, les établissements existants ne suffisent plus à absorber la poussée démographique amorcée dans les années 1980 et poursuivie avec des pics chronologiques décalés dans les communes — ou fractions de communes — rattachées selon la carte scolaire. Au sein même de l’agglomération, de nouveaux collèges publics drainent des populations plus éloignées. Ainsi, à l’est, Basse-Goulaine dès 1994 et Thouaré en 2002, puis Vertou au sud en 2007. Cette dernière création s’ajoute aux deux établissements, l’un privé, l’autre public, bien implantés au chef-lieu de canton. Tous étendent leur aire d’attraction sur le Vignoble en constant développement. À Treillières, deux collèges ouvrent leurs portes à un an d’intervalle. Le secteur privé (2001) précède le secteur public (2002). Il faut faire face au déficit d’accueil des élèves du second degré sur un territoire en pleine explosion périurbaine où le département enregistra les années précédentes, entre 1990 et 1999, le plus fort gain d’effectifs dans le primaire à l’échelle communale: + 340 enfants à Treillières, sans compter un apport presque identique des deux communes voisines réunies. Entre le deuxième et le troisième cercle, soit entre 20 et 30 km du centre de Nantes, les aires de recrutement s’agrandissent. Les créations du public côtoient des collèges privés plus anciens: ainsi dans le vaste secteur de Saint-Philbert-de-Grand-Lieu conquis, pour partie, dès les années 1980 et doté d’un établissement en 1991. Les flux croissants de cette zone intermédiaire en profonde mutation sont répartis entre divers collèges, souvent situés hors des limites de l’aire urbaine et menacés de saturation. En 2008, doit ouvrir à Sainte-Pazanne un collège de haute qualité environnementale (HQE). Il accueillera les jeunes de huit communes auparavant scolarisés en trois autres collèges: Le Pellerin, Bouaye et Machecoul. Au nord de la Loire, la situation est telle que deux créations initialement prévues en 2015 sont avancées à la rentrée 2011 dans le pays d’Ancenis, à Ligné, puis en 2012 à Héric, commune traversée par la route de Rennes. Le président du Conseil général, Patrick Mareschal, le dit nettement au printemps 2007: «Les besoins en places de collège vont un peu plus vite que notre capacité à agir. La population se déplace très rapidement et nous devons nous adapter à la demande.» (Ouest-France, mai 2007). Un impératif. Le prix de la dynamique. À plus ou moins long terme, le nouvel atout d’un collège public, «agent de polarisation le plus puissant», permettra peut-être à l’une ou l’autre de ces communes — Aigrefeuille, Sainte-Pazanne, Ligné ou Héric — de franchir un échelon dans la hiérarchie des bourgs-centres établie par Valérie Jousseaume en 1993, une hiérarchie où tous se situaient au niveau élémentaire d’équipement incomplet et de rayonnement plus ou moins limité (Jousseaume, 1998). Comment freiner l’exode urbain des jeunes couples? L’ample brassage de population sur le territoire de Nantes-Métropole pose aux collectivités locales de graves problèmes, celui du logement en tout premier lieu. Nantes intra-muros connaît, de 1990 à 1999, l’une des plus fortes dynamiques démographiques de France (+10,4%). Le rythme ralentit, mais la croissance continue. Chaque année en ce début de siècle, l’agglomération s’enrichit de 5 000 habitants. Cependant, «depuis 1997, tous les ans, 600 ménages quittent la métropole pour s’installer hors la ville… et ils s’éloignent de plus en plus», constate l’AURAN (Ouest-France, 8 juin 2006). Par le biais de l’évolution des populations scolaires à l’échelle fine des écoles primaires, la ville-centre offre un exemple, certes particulier, mais très révélateur, de l’extrême complexité de ces mutations intra-urbaines. Un exemple d’autant plus instructif que le vaste territoire communal — 6 500 hectares — vaut à Nantes de voir se développer en ses propres limites un phénomène de banlieue, avec construction de grands ensembles dans les années 1960-1970 et, aujourd’hui encore, des possibilités d’urbanisation sur son ancienne frange maraîchère. En conséquence, la population nantaise présente une grande diversité sociale. La ville concentre les situations extrêmes de richesse et de pauvreté (carte 6).
En vingt-deux ans, de 1984 à 2006, la chute sévère des effectifs dans l’enseignement primaire (-21%) dit le vieillissement de la population. Toutefois, les pertes de la période 1984-1990 (-11%) excèdent celles des suivantes: -5,4% entre 1990 et 1999, -4,2% de 1999 à 2006. Et Nantes scolarise encore 18% des écoliers du département, soit 24 500 élèves, dont près du tiers dans les écoles privées sous contrat. Le dynamisme démographique d’un quartier — structure par âge de la population et mouvements migratoires — ne sont pas les seuls facteurs d’évolution des effectifs d’un établissement scolaire. Interviennent aussi les mesures prises par nécessité pédagogique ou les restructurations d’écoles. Des transferts de voisinage s’opèrent aussi d’une école à l’autre, comme au sein d’un même secteur, public ou privé. Néanmoins, la carte du solde des effectifs à seize ans d’intervalle, au-delà d’une grande dispersion des soldes positifs comme des soldes négatifs, témoigne de quelques grandes lignes de mutations en cours depuis les années 1990. L’hémorragie de prime jeunesse frappe au plus fort les écoles des quartiers «en difficulté» et d’autres aussi, dans le centre-ville et le centre-ouest ou aux abords des boulevards du XIXe siècle. Mais là s’amorce une inversion de tendance que de nombreuses constructions en cours permettront peut-être de confirmer. Entre 1999 et 2006, hors zone d’éducation prioritaire, les effectifs cessent de baisser. En revanche les ZEP continuent de perdre des élèves — 1 200 en 16 ans — pour l’essentiel à l’ouest de la ville. Certains de ces grands ensembles HLM connaissent des phases de démolition-réhabilitation ou de reconstruction: ainsi Les Dervallières et la cité intégrée au Grand Projet de Ville «Malakoff-Pré Gauchet». Un Contrat urbain de cohésion sociale signé en 2007 doit aider tous ces quartiers à faire face au cumul de handicaps sociaux, notamment scolaires. La croissance des effectifs s’inscrit en des contextes divers: il est difficile de faire la part des transferts entre écoles voisines et celle des apports dus à la densification de l’habitat dans le secteur de Longchamp où un peuplement bourgeois se renforce. De même, dans le vieux quartier ouvrier de Chantenay, en profonde mutation depuis plus de dix ans et très prisé des «nouveaux Nantais». Au contraire, en centre-ville, les fortes hausses accompagnent la transformation du tissu ancien dans le cadre de zones d’aménagement concerté: ZAC dite de Sully et ZAC Madeleine-Champ-de-Mars. Saint-Joseph de Porterie, autre point fort, relève d’une conquête urbaine plus tardive à l’est de l’Erdre qu’à l’ouest. Afin de freiner l’étalement urbain, en partie consécutif à la flambée des prix de l’immobilier, et le départ des jeunes couples hors de son territoire, la métropole nantaise a pris un certain nombre de mesures qui, par l’ampleur des projets, touchent autant la ville-centre que les autres communes. La construction de logements neufs fléchit dans les premières années 2000. Surtout, «il manque encore 7 700 logements sociaux dans le périmètre de Nantes Métropole», estime le vice-président de la CUN, Gilles Rétière en 2005. Le Programme local de l’habitat adopté en 2004 veut relancer la construction neuve, avec pour objectif 3 900 logements par an dont 900 logements sociaux répartis, tous types confondus, entre Nantes (44%) et la périphérie (56%). Un objectif plus difficile à atteindre en banlieue que dans la ville-centre qui, trois ans durant, tient le rythme de 1 600 permis annuels. La ville est touchée en tous points par le renouvellement urbain, mais les grandes opérations d’urbanisme absorbent la plus grosse part de cette croissance actuelle et à venir. La ZAC Bottière-Chênaie tout d’abord avec 1 500 logements édifiés sur d’anciennes tenues maraîchères et un groupe scolaire ouvert en 2008; la ZAC de Saint-Joseph-de-Porterie ensuite, avec un potentiel comparable. L’aménagement emblématique de l’île de Nantes sur des friches industrielles, celles des chantiers navals en particulier, prévoit 1 800 logements dans un premier temps et le Grand Projet de Ville doit en accueillir un millier sur le Pré Gauchet d’ici 2009 (Nantes passion, 2005). En 2005, seules deux des 24 communes de la CUN atteignent le taux de logements sociaux requis aux termes de la loi Solidarité et renouvellement urbain (SRU): Saint-Herblain (27%), Nantes (23%); quatre autres s’en approchent: Bouguenais, Couëron, Rezé, Orvault, entre 19 et 17%. L’habitat individuel en accession à la propriété à des coûts non prohibitifs pour des budgets «moyens» fait aussi cruellement défaut. À Nantes, le Programme local de l’habitat (PLH) vise à améliorer la situation par l’exigence d’un taux minimum de 25% de logements sociaux et de 20% à 25% de logements dits «abordables» ou «accessibles» à des revenus modestes, c’est-à-dire vendus à des prix inférieurs de 20 à 25% à ceux du marché. Toutes les grandes opérations d’urbanisme en cours répondent à cette norme. Des programmes privés répartis dans la ville offrent également des logements de ce type. De même, en 2006, la CUN donne aux primo-accédants éligibles au prêt à taux zéro de l’État la possibilité de souscrire un prêt à taux zéro complémentaire. L’objectif initial de 600 attributions annuelles est aujourd’hui dépassé et près de la moitié des titulaires, en majorité de jeunes couples d’une trentaine d’années, s’installent à Nantes dans un logement souvent ancien. Par ailleurs, un dispositif préserve de toute dérive spéculative l’acquisition d’un logement social ou aidé. Les bénéficiaires ne peuvent revendre leur bien avant un délai de 5 à 7 ans. À l’échelle communautaire, la pleine réussite de cette politique implique de combler un gros déficit en réserves foncières. En 2006, la Région a créé un établissement public foncier pour aider les communes — La Chapelle-sur-Erdre par exemple — à faire face aux besoins. Au sud de la Loire, la ville de Rezé programme en 2010 l’arrivée des premiers habitants d’une ZAC de 17 hectares déjà acquis et dédiés aux deux tiers à la construction de 800 logements. Mais, pour cause de problèmes de voisinage ou de contestation des prix de rachat de terrain jugés trop bas, des procédures judiciaires entravent le démarrage de vastes opérations: ainsi au nord-ouest de Nantes, à Saint-Herblain où un programme prend quatre ans de retard, tandis qu’à Couëron l’année 2007 ne verra pas le début des travaux sur une ZAC de 100 hectares promise à l’édification de 1 500 logements et d’une école. Il n’est pas toujours simple de concilier intérêt général et intérêts particuliers pour contribuer à développer la mixité sociale. Conclusion L’exode urbain des jeunes couples, en Loire-Atlantique comme ailleurs, est un double symbole: symbole d’un dynamisme certain, mais aussi symbole d’un marché immobilier de plus en plus sélectif. L’aspect positif d’une revitalisation des campagnes l’emporte quand la population croît et rajeunit jusqu’en des lieux, il y a peu, à l’écart des flux migratoires. Les besoins en équipements scolaires et leur évolution sont autant signes que ferments d’évolutions en cours et à venir. À la rentrée 2007, l’inspecteur d’académie, Gérard Prodhomme, précise: «La population scolaire a augmenté de 5,5% depuis 5 ans dans le premier degré. Ça représente 7 000 élèves en plus. Et cette croissance va se confirmer puisqu’on attend quelque 5 900 élèves supplémentaires entre 2006 et 2011» (Ouest-France, 5 septembre 2007). «La ville diffuse», selon l’expression de l’urbaniste Bernardo Sechi cité par Ariella Masboungi (Nantes passion, 2005), continuera de se développer, d’autant que, vivre à la campagne séduit toujours beaucoup de familles. Mais l’étalement urbain s’accompagne d’une sorte de ségrégation sociale rampante, quand l’essaimage d’un trop grand nombre d’actifs à plus de 25 ou 30 km de la ville et de leur lieu de travail est trop souvent contrainte financière. «Que quiconque souhaite habiter Nantes puisse le faire quels que soient ses revenus.» (Nantes passion, 2005). Ce vœu émis par Jean-Marc Ayrault, président de la CUN et député-maire socialiste de Nantes, exprime une volonté politique et le sens des récentes mesures prises par les collectivités locales pour affronter la crise persistante du logement. Mais ces mesures ne porteront tous leurs fruits qu’à moyen terme. Les recompositions sociales des territoires tendent à gagner l’ensemble du département sous l’effet de la poussée métropolitaine et des pressions démographiques et foncières associées aux profondes mutations économiques. Références bibliographiques AURAN (2007). «Grands indicateurs de l’évolution des territoires: tendances observées et éléments pour l’avenir». Audition de J.Y. PAILLOUX, directeur de l’AURAN, Conseil de développement de Nantes Métropole, 12 juin 2007. CAUE44 (2002). Lettre d’information du CAUE44, n° 1. CONSEIL GÉNÉRAL LOIRE-ATLANTIQUE (2006). Atlas départemental. Document interne. CONSEIL GÉNÉRAL LOIRE-ATLANTIQUE (2006). Le Magazine du Conseil général, n°52. CROIX N., RENARD J. (1990). «La diffusion de l’urbanisation dans les campagnes nantaises». Cahiers nantais, n° 33-34, p. 281-303. JOUSSEAUME V. (1998). L’Ombre d’une métropole, Les bourgs-centres de Loire-Atlantique. Rennes: Presses universitaires de Rennes, coll. «Espace et territoires», 209 p. ISBN: 2-86847-309-1 JOUSSEAUME V., MADORÉ F. (2007). «0n ne s’installe pas à Saffré par hasard». Place Publique, n° 5, septembre-octobre 2007, p. 31-34. NANTES MÉTROPOLE (2005). «Quelle ville pour demain? Du diagnostic au Projet d’Aménagement et de Développement Durable. Consultation préalable à la révision des plans locaux d’urbanisme». Nantes: AURAN, 21 p. Nantes passion (2005). «Nantes demain, la ville en projet, 2005-2010», numéro hors série, 51 p. Nantes passion (2007). «Développement durable. Ce que fait la ville», n° 174, p. 15-18 OBSERVATOIRE DE L’AGGLOMÉRATION NANTAISE ET DE SON BASSIN DE VIE (2006). La Dynamique des marchés de l’habitat. Nantes: Nantes Métropole, CINA, AURAN, 32 p. (voir) RENARD J. et al. (1990). Nantes et son agglomération. Nantes: Ouest Éd., n° spécial des Cahiers nantais, 340 p. ISBN: 2-908261-50-2 RENARD J. (2007). «De la ville sans banlieue à l’archipel nantais». Place publique, dossier «Jusqu’où la ville va-t-elle s’étaler?», n° 5, p. 6-17 Notes 1. La situation difficile à laquelle doit faire face le ministère de l’Éducation nationale résulte d’un renversement de tendance démographique plus sensible dans les régions Sud et Ouest du pays. À partir de 1995, la natalité cesse de baisser et le boom des naissances de l’an 2000 engendre de nouveaux besoins, d’autant que la scolarisation dès l’âge de deux ans progresse. En 1999, les effectifs repartent à la hausse dans l’académie de Nantes. La loi de finances 2001 prévoit, à l’échelle nationale, un contingent exceptionnel de nouveaux postes également destinés à améliorer le taux d’encadrement. Le différend porte sur l’évaluation des besoins. 2. Effectifs: l’étude ne prend pas en compte les effectifs des écoles privées hors contrat, ni ceux de l’enseignement spécialisé des deux secteurs, soit, au total, moins de 1% des effectifs globaux du département. En raison d’une grève administrative des directeurs d’écoles, les données de l’enquête lourde inconnues pour certains établissements sont remplacées par les données de l’enquête rapide effectuée le jour de la rentrée. 3. La participation de l’État porte à 50% le montant des aides subventionnées, ainsi à Paulx pour la réouverture de l’école en 2006. 4. L’Agence d’Urbanisme de l’Agglomération Nantaise (AURAN) trace le périmètre du bassin de vie à partir de plusieurs indicateurs issus des Déclarations annuelles de données sociales (DADS), de l’observation des lieux de travail et d’habitat, de la répartition des permis de construire. Sur ce territoire, qui englobe 120 communes dont quelques-unes en Maine-et-Loire et Vendée, vivent aujourd’hui 840 000 personnes. 5. Sources: Notaires de l’Ouest, «Les notaires et le marché de l’immobilier en Bretagne», mars 2006. Base de données Perval. 6. Rappelons entre autres: le nombre de ménages accru, les mesures de défiscalisation, les faibles taux d’intérêt, les prêts à taux zéro, la hausse des coûts de la construction. 7. Enquête auprès du service d’urbanisme de la commune de Casson. |