N° 90 (2-2008)
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De la transhumance au nomadisme:
les nouveaux modes de déplacement des sociétés pastorales andines
Université de Pau et des Pays de l’Adour, UMR SET 5603 CNRS et UPPA |
Dans la zone sahélienne, l’élevage a souvent été tenu pour responsable de la désertification. Dès le début du XXe siècle (Hubert, 1920; Auberville, 1945), on soutient que la gestion des troupeaux par les pasteurs provoque du surpâturage, participant ainsi à l’avancée du désert (Lamprey, 1975). Ainsi J. Hecq, en 1972, interprète clairement la désertification comme le «résultat de l’altération du système nomade». Longtemps posé en termes de capacité de charge, le problème des ressources était alors imputé à l’«incohérence des déplacements», à «la concurrence pour l’utilisation des ressources fourragères», et à «l’anarchie des modes d’exploitation» (Peyre de Fabrègues, 1987, p. 310). Il apparaissait clairement que «l’équilibre cheptel et fourrage» ne serait jamais «réalisé durablement tant que l’élevage sahélien correspondrait principalement à une activité de cueillette» (ibid., p. 309). Plus que le pastoralisme lui-même, ce sont alors les pratiques et les stratégies des pasteurs qui sont remises en cause. Plus récemment, A. El Aich et A. Waterhouse (1999) ont montré comment le pâturage peut favoriser la biodiversité et maintenir des biotopes particuliers. Comme le soulignent A. Bourbouze, P. Lhoste, A. Marty et B. Toutain (2002), la démonstration scientifique du rôle de la mobilité dans la protection de l’environnement n’est pas aisée; néanmoins, les pratiques circulatoires pastorales sont aujourd’hui considérées comme des outils de lutte contre la désertification (Genin, 2004; Dodd, 1994 pour l’Afrique subsaharienne; Perevolotsky, Seligman, 1998 pour le bassin méditerranéen; Miehe, 2006; Bourbouze, Lhoste, Marty, Toutain, 2002 pour le Sahel). Mais dans un contexte général où la sédentarité constitue une norme, la compréhension des logiques des mobilités constitue un véritable enjeu. Dans les Andes, les dynamiques observables actuellement dans les sociétés pastorales soulèvent les mêmes questions. Les pasteurs de la puna (1) vivent dans un espace qui peut être qualifié de marge agro-écologique, dans le sens où l’altitude introduit une contrainte bioclimatique excluant le recours complémentaire à la culture, et provoquant une spécialisation dans l’élevage. Ces hauts sont d’ailleurs considérés par les cultivateurs comme des terres hostiles bien qu’économiquement rentables, et les populations qui y vivent sont perçues comme marginales. Depuis longtemps déjà, le gardiennage de troupeaux multi-espèces (alpagas, lamas, ovins) constitue l’activité quotidienne des familles, et plus particulièrement des femmes quand les hommes se rendent dans les centres urbains pour commercialiser leurs fibres ou partent avec une caravane de lamas (et aujourd’hui en camion) troquer les produits de l’élevage contre les denrées agricoles produites dans les étages de moindre altitude. Contrairement aux pasteurs sahéliens, ce sont des familles sédentaires, logeant dans des habitations fixes et dont les déplacements saisonniers ont généralement été assimilés au modèle de transhumance (Brunschwig, 1990). Dans un contexte régional difficile où les marchés urbains n’offrent pas de possibilités d’emploi et où les productions de l’Altiplano présentent une valeur ajoutée moindre (la production de fibre d’alpaga spécifique à la puna est bien plus rémunératrice que la production de tubercules et de céréales de l’Altiplano, Charbonneau, Poinsot, 2007), les régions de la puna Sud demeurent attractives malgré leur isolement, ce qui entraîne une augmentation des densités. Or, dans cet espace qui constitue à la fois une marge écologique andine et un cœur économique régional, la croissance démographique conjuguée à l’assèchement des zones humides entraîne une augmentation de la pression sur la ressource. Des processus classiques de régulation et d’optimisation sont observables et passent, entre autres, par une modification des pratiques d’élevage classiques: l’allotement, la conduite du troupeau, l’exploitation, le renouvellement, la valorisation (Landais, 1993), mais aussi l’agrégation territoriale (intégration ou perte de nouveaux espaces), ou la modification du substrat végétal (Caron, 1998). Mais les pratiques circulatoires constituent aussi une réponse. En effet, dans un contexte de pression sur la ressource, nous faisons l’hypothèse que les déplacements saisonniers apparaissent à la fois comme des indicateurs et comme une alternative à la pression. Après avoir montré que les pasteurs ont traditionnellement adopté une mobilité bien particulière proche de la transhumance, mais construite sur de tout autres logiques, nous constaterons qu’ils entrent aujourd’hui dans une phase de diversification des types de circulation qui traduit leur capacité d’adaptation et révèle la nécessité de prendre en compte la mobilité face aux problèmes que pose la pression sur la ressource fourragère. La transhumance andine, un modèle de déplacement saisonnier basé sur la complémentarité des communautés végétales La communauté: simple cadre juridique d’une gestion individuelle
On s’intéresse ici aux systèmes pastoraux du district de Paratía (Puno, Lampa), situé dans la cordillère occidentale des Andes centrales du Pérou entre 4 200 et 5 400 mètres d’altitude. Issu de vingt mois de recherches sur le terrain entre 2004 et 2007 dans le cadre d’une thèse de géographie, ce travail s’appuie principalement sur des entretiens avec des pasteurs de quatre communautés du district (fig. 1). Dans une perspective de comparaison, le suivi de trente familles a été complété par des entretiens plus rapides avec une quarantaine de membres des communautés et par de l’observation participante. En outre, l’histoire foncière a été éclairée grâce à une compilation de cadastres et un travail en collaboration avec des ingénieurs locaux chargés d’établir les limites des propriétés. Enfin des éléments descriptifs issus de monographies andines (Flores Ochoa, 1968, 1975 a, b, 1977; Cazaverde, 1985; Palacios Rios, 1988; Amílcar Bustinza Menéndez, 1999) ont permis d’établir une comparaison des pratiques. Notre démonstration s’appuiera ici plus particulièrement sur l’exemple de la communauté de Llanca (fig. 1). À l’image du district dans lequel elle s’insère, cette communauté est constituée d’une population pastorale (même si quelques personnes diversifient leurs activités en travaillant dans les mines (2) ou sur les marchés urbains du bas) qui se consacre à l’élevage d’un troupeau multi-espèces composé en moyenne de 70% d’alpagas, de 10% de lamas, et de 20% d’ovins (fig. 2A). Étagée entre 4 400 m et 5 200 m d’altitude (fig. 2B), elle est organisée autour d’une vallée principale (rivière Quillisani) près de laquelle s’est installé un petit centre (composé d’une école, de deux habitations et d’un local communal). Peu actif au quotidien, il s’anime lors de la foire hebdomadaire où se retrouvent les éleveurs de la communauté et les commerçants venus du bas. Cette vallée offre le seul accès motorisé; à la fois axe de passage et lieu de regroupement (fig. 2C et D), elle s’apparente au cœur de la communauté. Plus on s’éloigne de cet axe principal, et plus l’accessibilité aux services devient difficile (deux à trois heures de marche entre l’extrémité ouest de la communauté et son centre). Traditionnellement, les terres et le troupeau sont gérés par une unité domestique composée de plusieurs familles nucléaires appartenant à la même fratrie (peuvent s’ajouter frères, sœurs célibataires, et grands-parents), et vivant dans trois ou quatre petites maisons de pierres sèches ou d’adobe. Chaque unité de résidence est alors distante des autres unités domestiques. L’ensemble de ces familles élargies sont regroupées en parcialidades (3). Mais avec les mesures de restructuration agraire prises dans les années 1980 par le gouvernement de Belaunde, puis la promulgation de la Loi générale des Communautés paysannes de 1987 (Del Pozo-Vergnes, 2003, p. 157), les différentes exploitations individuelles se regroupent en communautés (4). Ainsi la parcialidad de Chanawayta se trouve divisée en quatre communautés (Llanca, Quillisani, Ccaqueri, Millocochapata). Aujourd’hui, Llanca s’étend sur un territoire de 5 635 hectares et regroupe 62 familles, soit environ 300 personnes (91 ha en moyenne par unité, les extrêmes oscillant entre 2 et 532 ha). Juridiquement, la communauté détient les terres exploitées par ses membres qui n’en ont que l’usufruit. En réalité, la gestion individuelle des terres et des troupeaux persiste. L’exploitation et les droits de succession sont déterminés pour chaque unité domestique. Les terres sont parfaitement parcellisées et appropriées par les membres, et la communauté n’intervient alors qu’en cas de litige. Une «mobilité résidentielle» proche de la transhumance Généralement, chaque famille a accès à différentes synécies (groupement végétal). En effet, au sein de l’étage écologique de la puna, on distingue plusieurs communautés végétales: certaines dures et sèches, à faible productivité fourragère, et dominées par les pajonales (5) et les gramadales (6), qui produisent de 100 à 1 000 kg de matière sèche/ha/an d’après D. Genin et H. Alzérreca (2006) (7); et une autre plus humide et plus courte, dénommée bofedal (8) (prairie humide). Ces bofedales ont une distribution spatiale aléatoire ou plutôt topo-hydrologique et non pas altitudinale. Les résurgences à l’origine de ces formations végétales apparaissent en différents points des versants et sont commandées par la circulation hypodermique et phréatique. Cette formation végétale, convenant particulièrement à l’alpaga (qui pour des raisons physiologiques a besoin d’une importante alimentation en eau), est la communauté dont la productivité est de loin la plus forte: selon M. Tapia Núñez et J. Flores Ochoa, 1984, elle peut atteindre 6 000 kg de matière sèche/ha/an (9). Leur caractère pérenne et les possibilités d’extension par des canaux d’irrigation lui donne le rôle d’une oasis pendant la saison sèche, qui provoque l’assèchement du pajonal et du gramadal. Chaque unité domestique possède ainsi plusieurs quartiers («ensembles de secteurs pâturés à une même époque de l’année, en général à partir d’une même couche ou couchade, lieu de repos nocturne du troupeau», Savini, Landais, 1993), contigus ou non, qui regroupent notamment ces quatre synécies (fig. 2E). Sur chacun de ces quartiers, chaque unité domestique construit une habitation qui sera occupée temporairement par le groupe. Généralement, au moins un de ces ensembles de secteurs pâturés est composé de bofedal, et les groupes familiaux organisent leurs migrations en fonction de la situation et de la superficie de ces prairies humides (fig. 2F). Pendant la saison des pluies (de décembre à mars/avril), l’ensemble de la famille s’installe dans l’estancia, ferme d’élevage, considérée comme la résidence principale, et composée de plusieurs enclos (corrals) et petites cabanes (cuisine et lieu de couchage pour les différents membres de la famille). Durant cette saison, il tombe en moyenne 149 mm d’eau par mois, les températures moyennes oscillent autour de 6,5 °C, avec des minima moyens de -0,8 °C et des maxima moyens de 13,4 °C (selon les données du SENHAMI, moyennes des températures et des précipitations des quarante dernières années). Quartier d’été, essentiellement composé de pajonal ou de gramadal, il constitue le terrain le plus sec de la propriété et finit généralement brûlé par les huit mois de sécheresse. En revanche, en saison des pluies l’ensemble de la puna se couvre de pâturages verts et humides, et ce quartier regorge l’eau. Pendant la saison sèche, de mai à décembre, l’ensemble de la famille se déplace dans le quartier où se trouvent les bofedales. Les biens personnels (ustensiles de cuisine, accessoires de couchage, vêtements, etc.) sont transportés à dos de lama jusqu’au nouveau lieu de résidence. L’estancia reste à peu près vide (à l’exception des aliments troqués dans les étages inférieurs) et ses portes sont obturées par des pierres. Les deux quartiers, s’ils ne sont pas attenants, sont situés à proximité l’un de l’autre, le voyage n’excède jamais quelques heures de marche (entre une demi-heure et cinq heures) et le voisinage des deux propriétés facilite la surveillance de l’habitation temporairement abandonnée. Pendant cette saison sèche, il tombe en moyenne 24 mm de précipitations par mois, les températures moyennes descendent à 4,4 °C, avec des maxima moyens de 13,9 °C en journée et des minima nocturnes de -7,7 °C. La présence de sources ou de zones humides est indispensable à l’alimentation des animaux durant cette saison sèche et froide. Dans ce quartier, les habitations sont généralement moins nombreuses et plus rustiques. Elles s’apparentent aux cabanes de bergers des éleveurs transhumants alpins ou pyrénéens et sont d’ailleurs baptisées cabañas en espagnol. Parfois les familles possèdent deux quartiers de saison sèche, et le second leur permet alors de pratiquer l’allotement ou de laisser le premier en repos.
La plupart des études andines assimilent ces déplacements saisonniers à une transhumance. G. Brunschwig (1990) et J. Flores Ochoa (1975a) ont ainsi clairement démontré les logiques haut/bas de ces déplacements. «Pendant l’époque sèche, les pâturages de puna sèchent et jaunissent. N’étant plus acceptés par les animaux, il devient nécessaire de les conduire dans les parties hautes, là où l’on trouve des zones propices à la croissance de plantes vertes et suffisantes en eau, grâce à la fonte des sommets enneigés, aux infiltrations, aux ruisseaux et aux marais […]. En été, quand les pluies et les neiges augmentent les animaux sont emmenés dans les parties basses, près de la résidence permanente. (10)» (Flores Ochoa, 1975a, p. 313). On migrerait donc vers les bas en saison des pluies pour fuir la neige qui recouvre les ressources fourragères, et vers le haut en saison sèche pour y trouver l’humidité. Or dans les cas étudiés, les deux quartiers se situent dans une même zone écologique (la différence altitudinale entre les deux quartiers excède rarement 200 ou 300 mètres) et les mouvements ne se font pas nécessairement de bas en haut. Sur les trente familles étudiées, plus d’un tiers descendent en saison sèche. Certes, l’eau commande les déplacements, mais les zones humides ne se situent pas nécessairement à plus haute altitude et les pasteurs ne disposent pas forcément de terres à différents «étages». La «transhumance» s’organise donc en premier lieu en fonction de la configuration de chaque propriété et de la complémentarité entre les différentes communautés végétales (fig. 3). Elle se fait du quartier sans bofedal en saison des pluies vers le quartier avec bofedal en saison sèche. Elle peut ainsi avoir lieu de bas en haut mais pas nécessairement puisque le bofedal est parfois situé en bas et que dans certaines propriétés les quartiers sont situés à même altitude. Néanmoins, le déterminant altitudinal joue aussi un rôle sur ces migrations puisqu’une moindre altitude va de pair avec une diminution de la couverture neigeuse, augmentant ainsi les possibilités de pâturage en saison des pluies et favorisant la survie des jeunes grâce à des températures un peu moins basses. Ainsi, si l’eau constitue le déterminant premier des migrations saisonnières, l’altitude intervient comme déterminant secondaire. Les mouvements saisonniers des pasteurs andins, basés sur une multi-résidentialité de l’ensemble de l’unité domestique, ont donc lieu au sein d’un même étage écologique, entre deux ou trois quartiers composés d’un assemblage de communautés végétales variées (fig. 3). Ce modèle correspond aux mouvements qu’effectuaient les parents ou les grands-parents des pasteurs aujourd’hui actifs, mais actuellement, nous allons le voir, le schéma se trouve quelque peu modifié. La mobilité: une adaptation à la pression sur la ressource fourragère Une pression nouvelle sur la ressource En effet, si ces mouvements saisonniers persistent, leurs modalités sont quelque peu bouleversées par une pression croissante sur la ressource fourragère. Un article spécifique serait nécessaire pour traiter une telle thématique; comme notre thème d’étude concerne ici les formes de mobilités, nous ne ferons donc qu’évoquer les changements à l’origine de cette pression afin d’évaluer leurs impacts sur les déplacements saisonniers. Un premier changement, de plus en plus signalé par les chercheurs andins, est d’ordre climatique. Bien que peu informés du «changement global», les éleveurs soulignent la diminution des ressources en eau. En une seule génération, l’assèchement temporaire, ou définitif, de sources autrefois pérennes et la fonte des glaciers sont devenus des phénomènes qui préoccupent grandement les pasteurs. La diminution des pluies soulignée par les habitants n’est pas confirmée par les données météorologiques du Senhami. En effet, la figure 4 montre une tendance à l’augmentation des précipitations; mais elle indique aussi une hausse des températures ces quarante dernières années. Or, ce réchauffement est à l’origine d’une augmentation des précipitations pluviales au détriment des précipitations nivales. Un tel phénomène entraîne une augmentation du ruissellement et de l’évaporation et un tarissement plus rapide des sources, alors qu’auparavant la couverture nivale favorisait l’infiltration et le stockage, alimentant la réserve utile des sols et permettant une alimentation pérenne. Certes l’augmentation des densités humaines corrélées à celle des cheptels peut être à l’origine de ce sentiment de manque d’eau de la part des pasteurs, mais la localisation de nombreux points d’eau autrefois pérennes et aujourd’hui temporaires semble confirmer l’hypothèse climatique. En outre, la construction de canaux qui peut elle aussi expliquer le déficit est bien postérieure au constat d’assèchement des pasteurs. L’assèchement des sources provoque la disparition des zones humides et des bofedales et la diminution des précipitations sous forme de neige entraîne un assèchement accéléré des pâtures. Ce déficit hydrique crée bien un changement fondamental pour la gestion des ressources fourragères des troupeaux.
Cette mutation d’ordre climatique s’accompagne d’un accroissement démographique. Le Pérou se trouve en effet aujourd’hui en phase 3 de la transition démographique. La diminution récente du taux de natalité ne s’aligne pas encore sur la chute plus ancienne de la mortalité, provoquant une augmentation globale de la population. Cet accroissement naturel se double en outre d’une situation économique plutôt attractive de ces régions de puna par rapport à l’Altiplano qui l’entoure. Les recensements de l’Institut statistique national (INEI) révèlent cette hausse. Entre 1993 et 2005, les districts de puna du département de Puno connaissent ainsi une croissance démographique moyenne de 30% contre 8% dans les districts de l’Altiplano (INEI). Nos histoires de vie confirment cette tendance et celle de la famille Ccacho à Llanca (fig. 5) en est un parfait exemple. Il y a une cinquantaine d’années, une unité domestique composée de 21 personnes vivait d’un troupeau d’environ 800 têtes sur une superficie de 2 074 hectares (soit 98 ha et 38 têtes de bétail en moyenne par personne). Deux générations plus tard, sur cette même superficie, vivent une cinquantaine de personnes, réparties en 13 unités domestiques, possédant chacune en moyenne 150 alpagas sur 160 hectares (soit 41 ha et 39 têtes par personne). En deux générations, les superficies exploitées par une unité domestique ont été divisées par treize. Si le nombre moyen d’hectares disponibles par personne s’est réduit de 60%, le nombre d’animaux par personne demeure identique. En 50 ans, sur une même surface, la population a donc été multipliée par deux et demi et le cheptel par deux.
Globalement, la pression démographique entraîne une parcellisation des terres (quartiers plus petits et disjoints) et une augmentation de la charge animale à l’hectare. Or dans un système pastoral, des impératifs organisationnels liés à la conduite du troupeau entrent en jeu et introduisent un seuil (historiquement validé par la réforme agraire), situé autour de 100-150 têtes, en deçà duquel une famille ne peut vivre correctement (Charbonneau, Poinsot, 2008). Un ajustement des pratiques migratoires (multi-activité) et pastorales (allotement, collectifs de commercialisation, amélioration génétique, etc.) semble alors nécessaire pour faire face à cette situation. Dans ce contexte, la mobilité, objet d‘analyse de cet article, constitue une des réponses des sociétés locales. Vers une multiplication des déplacements
Comme nous l’avons spécifié en introduction, la confrontation à la réduction des superficies de parcours et à l’assèchement des pâturages entraîne la mise en place de régulations classiques, mais elle provoque aussi une modification des mobilités saisonnières. Reprenons l’exemple de la famille Ccacho. À la génération précédente (celle des fils), l’unité domestique gérait en commun le troupeau des quatre frères (fig. 5). De janvier à mars, l’ensemble des familles et des troupeaux était regroupé dans le quartier 1 (fig. 6). D’avril à mai ils migraient dans le quartier 2 avant d’opérer en juin une seconde migration dans le quartier 3 (une partie du troupeau partait aussi avec un des fils dans le quartier 4) puis revenaient en décembre dans le quartier de saison des pluies. Les déplacements saisonniers des frères Ccacho correspondaient à peu près au modèle établi précédemment (fig. 3). Aujourd’hui, les treize petits-fils sont encore présents à Llanca et gèrent indépendamment leur troupeau sur de petites propriétés distantes les unes des autres. Le fait de posséder plusieurs petites parcelles discontinues, au lieu de deux grandes, conduit à la multiplication des déplacements. La description des circulations de tous les petits-fils serait un peu fastidieuse et complexe (alliance, fils illégitimes, bergers, etc.), c’est pourquoi nous nous contenterons ici de l’exemple de deux unités domestiques. Le petit-fils 4c, Gregorio, a obtenu deux parcelles à la mort de son père. Marié à une femme extérieure à la communauté, il ne dispose donc que de ces deux terrains. La parcelle située dans le quartier de saison des pluies du père a été divisée en deux quartiers (fig. 7). Une partie du quartier de saison des pluies s’est donc transformée en quartier de saison sèche (fig. 8). L’unité domestique continue à posséder deux quartiers utilisés pendant la saison sèche, mais au lieu d’y effectuer un seul long séjour, elle réalise des allers-retours mensuels entre les deux. Le petit-fils 3a, Julian, décédé, a eu quatre enfants, dont seulement deux sont restés dans la communauté. Par le jeu des héritages et des alliances, l’un de ses fils, Carlos, est propriétaire des parcelles 1, 3 et 4, et il loue une parcelle à son frère durant la saison des pluies (fig. 7 et 8). Les déplacements sont aujourd’hui organisés autour de quatre quartiers dont les parcelles sont parfois continues (fig. 7). Il s’agit bien ici de parcelles foncières (composées de différents faciès de végétation) et non de parcelles d’utilisation des sols, plus communément appelées secteurs. En effet, un secteur, selon I. Savini et E. Landais (1993), correspond à une «subdivision du territoire pastoral dotée d’une certaine unité physique, dont les caractéristiques déterminent de la part du troupeau un comportement spatial et alimentaire particulier». La diminution de la superficie des parcelles et leur discontinuité sont ainsi à mettre en relation avec la multiplication des quartiers et des déplacements. Dorénavant on n’effectue plus un séjour continu dans chaque quartier, mais bien plusieurs séjours au cours d’une même saison. Diversité nouvelle des modèles et logiques de déplacement En définitive, il n’existe pas un nouveau modèle de déplacements, mais toute une gamme de nouvelles circulations. Six grands types se dégagent en fonction du calendrier, de la fréquence des déplacements, du nombre de quartiers exploités et des bofedales possédés (tabl. 1). Dorénavant, la plupart des unités domestiques détiennent plus de trois quartiers distants les uns des autres et les nouveaux pâturages sont essentiellement utilisés pendant la saison sèche. La multiplication des parcelles de petite taille explique l’augmentation des déplacements. Cependant, comme nous venons de le voir avec l’exemple de Gregorio, les unités domestiques qui ne disposent que de deux ou trois parcelles multiplient aussi leurs circulations. Comme le montre la figure 9, durant les huit mois de saison sèche, certains déménagent tous les trois mois alors que d’autres effectuent des rotations mensuelles et parfois même tous les quinze jours (dans un tel cas, les quartiers se situent à moins d’une demi-heure de marche les uns des autres). Certaines familles se déplacent ainsi plus de dix fois par an sur seulement deux ou trois quartiers (tabl. 1, fig. 9). À l’exception de quelques propriétés, les quartiers d’hiver sont trop réduits et ne permettent plus des séjours continus de plusieurs mois. Plus des trois quarts des familles enquêtées déclarent chercher des pâturages dans une troisième parcelle et revenir régulièrement dans le quartier de saison des pluies pour laisser en repos celui de saison sèche (fig. 9). Le retour de quelques mois sur le terrain de saison humide ou le déplacement vers de nouvelles terres (louées, achetées ou acquises lors d’un mariage) sont aujourd’hui indispensables. Finalement, les situations varient en fonction du nombre de quartiers, des rendements fourragers des pajonales et des gramales, mais surtout du nombre et de la superficie des bofedales. A priori, plus le bofedal est grand, plus la fréquence de déplacement diminue. Il y aurait donc un gradient de richesse entre ceux qui possèdent de vastes bofedales et ceux qui n’en possèdent pas. Néanmoins, même les plus «riches» se déplacent. En effet, un éleveur possédant un grand bofedal, mais aussi d’amples superficies de pajonal, voudra rentabiliser ces surfaces sèches autant que possible, en y retournant régulièrement, quand la hauteur de pousse est suffisante, et avant que la sécheresse de l’hiver ne grille les pâtures. Le plus souvent on s’arrange pour retourner dans ces quartiers après les pluies de fin de saison sèche, de début de saison sèche, ou de juillet, ou d’août. En effet, dans ce type de milieu, l’eau, plus que la température, constitue un facteur limitant la croissance végétale. Une petite pluie, même au cœur de la saison sèche, peut être à l’origine d’une repousse faible mais existante et largement dépendante de la surface foliaire restante. La figure 10 reprend le modèle «traditionnel» (fig. 3) en le déclinant en six types de circulation en fonction du nombre de quartiers, de déplacements et de bofedales. Les types A et C sont directement issus du modèle de déplacement traditionnel alors que les quatre autres sont apparus plus récemment. Si, comme nous l’avons souligné, les déplacements saisonniers s’approchaient originellement de la transhumance, il semblerait que les nouvelles mobilités se rapprochent du semi-nomadisme ou du nomadisme (type F) en ce qui concerne le mode d’habitat.
L’apparition de nouveaux types de déplacements souligne une tension palpable vis-à-vis de la ressource fourragère. La multiplication des quartiers et leur discontinuité entraîne une plus grande mobilité, et la diminution générale des ressources fourragères (assèchement et diminution des surfaces) un retour sur un quartier déjà utilisé au cours de l’année. On observe donc une diversification des modèles; les pasteurs composent avec leurs terres (surface globale, surface des communautés végétales, distance entre parcelles, rythmes de croissance de la végétation, regain, etc.), ainsi qu’avec les exigences familiales (12) (double activité, scolarisation des enfants, etc.). Les logiques de déplacements sont toujours basées sur une complémentarité entre faciès de végétation, mais c’est le rythme qui se trouve modifié. Une complémentarité «graduelle» a remplacé une complémentarité «dichotomique» (saison sèche, saison des pluies). La mobilité: une forme de régulation de la ressource fourragère? Au-delà d’une simple relation de causalité, cette adaptation peut aussi être interprétée en termes de régulation de la ressource. On peut formuler l’hypothèse d’une optimisation dans le temps par un mouvement de complémentarité entre communautés végétales (vitesse de décomposition et de croissance), permettant de ne pas mettre en péril la ressource malgré la pression. En revanche, les navettes plus nombreuses permettent de réduire ce gaspillage de ressources. Le retour sur le quartier de saison des pluies optimise le prélèvement sur ces parcelles en utilisant les repousses et en effectuant un pâturage léger en début de pousse afin d’étaler le prélèvement de la ressource dans le temps et de décaler les rythmes de croissance. De plus, les intervalles laissent un temps de repos qui permet la constitution de réserves et l’utilisation des quartiers en fonction des rythmes de croissance. Les déplacements vers des quartiers secondaires de saison sèche auraient la même utilité. Cette rotation permettrait au troupeau de profiter des nouvelles repousses avant leur dégradation due à la sécheresse, sans pour autant effectuer un prélèvement en dessous du plateau de tallage. Bien entendu, seules la relative proximité des différents quartiers et leur surveillance régulière rendent possible cette régulation par le déplacement, qui est d’ailleurs étroitement lié à l’apparition de nouvelles pratiques de modification du substrat végétal. L’extension des zones humides par irrigation en été permet d’allonger le temps de séjour sur le quartier de saison humide ou d’y revenir pendant la saison sèche, alors que l’extension des bofedales en hiver augmente la production fourragère des quartiers de saison sèche. Il faut néanmoins souligner que les pratiques circulatoires ne sont pas nouvelles puisque traditionnellement chaque quartier était divisé en secteurs contigus, entre lesquels les pasteurs effectuaient une rotation (qui ne s’accompagnait donc pas d’un déplacement de la famille). Mais avec la réduction des superficies, la rotation entre quartiers s’ajoute à celle qui existait déjà entre secteurs. Nous sommes donc bien dans une dynamique où la circulation permet de mieux valoriser la croissance des fourrages en conservant une parcelle en croissance pendant qu’une autre est utilisée. La rotation sur plus de trois quartiers est assimilable aux pratiques de pâturage tournant mais sur parcours. Elle correspond à une intensification de l’utilisation des ressources fourragères, puisqu’elle permet une augmentation de la production animale (en kg de croît par ha) (Bourbouze, 1987) en facilitant la repousse de l’herbe, en améliorant la flore, et la qualité du couvert végétal, en réduisant le gaspillage de l’herbe et en augmentant la valeur alimentaire de l’herbe offerte (Béranger, Micol, 1981). Face à ces nouvelles pratiques, on peut se demander si l’utilisation du bofedal ne peut pas être rapprochée de celle des luzernières telle qu’elle a été analysée dans les Andes centrales péruviennes par C. Aubron et G. Brunschwig (2007), tout en étant adaptée aux communautés végétales et aux superficies des terrains de parcours de puna. En revanche, à la grande différence de ces dernières, le pâturage tournant s’accompagne d’un déplacement familial. Les nouvelles formes de mobilité apparaissent donc comme des réponses à la pression sur la ressource, et dans une perspective de durabilité des exploitations, elles constituent une piste de recherche fondamentale.
Pour conclure, nous pouvons dire que l’étude fine des circulations saisonnières révèle une mobilité du groupe entier et une logique construite autour de la complémentarité entre différentes communautés végétales. Dans un contexte de pression sur la ressource causée par un déficit hydrique des sols et une augmentation des densités humaines, de nouvelles pratiques et stratégies de déplacements apparaissent. La fréquence des déplacements des groupes sociaux et le nombre de quartiers augmentent, la durée des séjours diminue engendrant une gamme de nouveaux modèles de mobilité. Si la logique de complémentarité entre communautés végétales demeure, elle est quelque peu réinventée par ce contexte de tension. Dorénavant, on ne se limite pas à une opposition saisonnière (quartier sans bofedal en saison humide, avec bofedal en saison sèche). Au cours de la saison sèche, on se déplace en fonction du rythme de croissance des communautés végétales de tel ou tel quartier. Cette nouvelle gestion des circulations, issue de l’inventivité et de l’adaptabilité des groupes sociaux, permettrait à la fois d’optimiser l’utilisation de la ressource dans le temps et dans l’espace et d’augmenter la charge animale à l’hectare sans pour autant mettre en péril la ressource fourragère. Ce serait alors un excellent exemple de transformation innovante des savoir-faire, démontrant une fois de plus que ceux-ci sont une véritable source à la fois de connaissance et d’ajustements des pratiques, et une source d’inspiration pour des ajustements dynamiques et durables. Bien entendu, les déplacements ne peuvent constituer à eux seuls une régulation de la pression animale sur le milieu. Ce n’est qu’une stratégie au sein d’une variété complexe de modes de régulation plus classiques énoncés en introduction. Mais à l’image des sociétés pastorales africaines, dans la puna andine péruvienne, la prise en compte du déplacement saisonnier apparaît comme un élément indispensable de la question de la durabilité. En considérant la mobilité saisonnière à la fois comme un indicateur des relations société/milieu et comme une forme de régulation, on peut alors la considérer comme un déterminant géographique de la durabilité des sociétés pastorales. Alors que les modes de déplacements les plus anciens sont assimilés à la transhumance, les nouveaux se rapprochent du pâturage tournant en tant que conduite du pâturage, et du nomadisme en tant que «mode d’habitat». En effet, pour P. Georges (2003), D. Retaillé (2003), H. Barral (1977) ou C. Lechartier (2005), le nomadisme est assimilé à un déplacement plus ou moins fréquent du groupe social dans son ensemble. Ainsi, en tant que «mode d’habitat» (Retaillé, 2003), où «l’habiter» est considéré comme une «spatialité typique des acteurs» et ne se limite donc pas à la forme du logis (Lévy, Lussault, 2003), les nouvelles formes de déplacement des pasteurs andins peuvent être assimilées à du nomadisme. Plus qu’à travers une habitation transportable, le nomadisme est considéré comme un rapport au territoire de résidence basé sur la mobilité. Mais en définitive, si l’on s’en tient au sens commun, il n’est possible de parler ni de transhumance ni de nomadisme. En effet, le déplacement des pasteurs andins a été associé à la transhumance par le caractère saisonnier des mouvements. Or nous avons vu que l’ensemble du groupe se déplace alors que la plupart des spécialistes (Georges, 2003; Retaillé, 1989; Bozon, 1983; Bernus, Centlivres-Demont, 1982; Chapdelaine, 1993; Tillet, 1995) s’accordent sur le fait que la transhumance «ne met en route que des bergers, non des familles ou des tribus» (Bozon, 1983: 93). En outre, ces déplacements ne concernent pas deux zones distinctes différenciées par un gradient altitudinal ou latitudinal, contrairement aux transhumances subsahariennes ou pyrénéennes. Enfin, les distances de déplacement sont beaucoup plus courtes. De la même façon pour certains auteurs (Bernus, Centlivres-Demont, 1982; Cabouret, 1968), bien que le groupe entier se déplace et que les déplacements soient fréquents, les nouvelles formes de circulation ne peuvent être associées à du nomadisme parce que la résidence n’est pas mobile. «Le nomadisme implique la mobilité totale d’un groupe humain, grâce à un habitat transportable ou suffisamment sommaire pour être reconstruit à chaque déplacement» (Bernus, Centlivres-Demont, 1982). Enfin, cela ne correspond pas non plus aux modes de résidence du pâturage tournant puisque tout le groupe se déplace. Les pratiques circulatoires et les formes de résidence des pasteurs andins ne sont donc aucunement assimilables aux pratiques pastorales plus connues, et il convient alors peut-être ici de penser leur mobilité autrement qu’à travers les modèles de sédentaire, de nomadisme ou de transhumance en ayant recourt tout simplement à l’idée d’itinérance ou en conservant le terme utilisé localement: traslado. Bibliographie AMÍLCAR BUSTINZA MENÉNDEZ J. (1999). «La ganadería puneña». Allpanchis, n° 53, Cusco: Instituto de pastoral andina, p. 51-73. AUBRÉVILLE A. (1949). Climats, forêts et désertification de l’Afrique tropicale. Paris: Société d’éditions géographiques maritimes et coloniales, 351 p. AUBRON C., BRUNSCHWIG G. (2007). «La gestion fourragère dans les élevages laitiers des Andes sèches: rationalité et performances». Fourrages, n° 189, p. 125-138. BARRAL H. (1977). Les Populations nomades de l’Oudalan et leur espace pastoral. Paris: Orstom, 119 p. BÉRANGER C., MICOL D. 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(1997). «Pastores de llamas en Caylloma (Arequipa) y modelos estructuralistas para la interpretación de su sociedad». In IIIe Congreso peruano: el hombre y la cultura andina. Lima: Ramiro Matos, p. 248-257. Notes 1. «D’après la classification de J. Pulgar Vidal (1987), la puna constitue l’étage écologique des Andes sèches situé entre 3 800 et 4 800 mètres et caractérisé par ses steppes herbeuses de haute altitude. Or, dans les parties basses de cet étage (zone de transition entre l’étage suni et l’étage puna), des cultures de tubercules et de légumineuses sont encore possibles, et les pratiques et les stratégies de gestion de la production s’en trouvent modifiées. Nous désignerons donc par puna les régions de steppe herbeuse comprises à peu près entre 4 200 et 5 000 m d’altitude, où les contraintes bioclimatiques interdisent presque toute culture et imposent un pastoralisme extensif.» (Charbonneau, Poinsot, 2008). 2. Même si une entreprise minière possède une exploitation au sein même du district, les pasteurs sont généralement embauchés dans les districts voisins, la concession préférant faire appel à des travailleurs extérieurs pour éviter les conflits d’intérêt. 3. Jusqu’aux années 1980, le district est divisé en parcialidades qui sont les niveaux de base de la vie politique. Mais dans la zone d’étude, la gestion des terres et des troupeaux au sein de chaque parcialidad était totalement individuelle. 4. Depuis les années 1980, la plupart des parcialidades sont devenues des communautés, «personnes morales reconnues par l’État, propriétaire des terres issues de l’ancienne parcialidad. Les éleveurs ne sont plus qu’usufruitiers des pâtures, même si la propriété du troupeau demeure largement privée.» (Charbonneau, Poinsot, 2008). L’organisation sous forme de communauté permet alors, entre autres, d’obtenir des terres libérées par la réforme agraire, d’éviter l’expropriation, et de bénéficier de l’aide des ONG qui s’adresse essentiellement aux groupes. 5. «Graminetum ouvert dominé par la graminée siliceuse pérenne Fetusca orthophylla» (Tichit, 1998, p. 15). 6. «Pelouse de graminées rases stolonifères associées à des caméphytes» (Tichit, 1998, p. 15). 7. Nous ne disposons pas des données pour les pâturages de Paratía, mais la comparaison effectuée entre les chiffres proposés par Tapia Nunez et Flores Ochoa (1984) pour les régions de puna sèche du Pérou avec celles de Genin et Alzérreca (2006) pour la puna plus aride de Bolivie correspondent à peu près pour les pajonales. En revanche, la productivité du bofedal est plus faible en puna aride. Nous avons pris les données de M. Tapia Núñez et J. Flores Ochoa (1984) comme références. 8. Sol hydromorphe naturel ou anthropique inondé en permanence regroupant les genres Distichia, Plantago, Carex, Calamagrostis, Gentiana, Werneria (Genin, Alzérreca, 2006). 9. Il convient de souligner que la productivité varie d’une année à l’autre et d’un secteur à l’autre. Ce chiffre correspondant à un bofedal situé en puna sèche n’est donc qu’indicatif. 10. «En la época de secas, los pastos de la puna se secan y amarillean, no siendo aceptadas por los animales, por lo que se les debe de conducir a las partes altas, donde hay zonas propicias para el crecimiento de plantas verdes, con suficiente cantidad de agua, gracias a los deshielos de las cumbres nevadas, las filtraciones, los arroyuelos y pantanos. […] En el verano, cuando aumentan las lluvias y nevadas, los animales son llevados a las partes bajas o cerca de la residencia permanente.» 11. Les calendriers varient selon l’utilisation plus ou moins continue des quartiers. À titre d’exemple, nous avons donc sélectionné pour chacun des types une des familles suivies. 12. La question de l’adaptation sociale au nomadisme est un aspect fondamental de la durabilité de ces sociétés. Elle est d’ailleurs en étroite relation avec l’apparition de noyaux de peuplements qui transforment les mobilités et exigent une fixation loin des exploitations (Charbonneau, 2008). |