Atlas mondial de la santé

Cet ouvrage (1), comme les autres de la même collection, fonctionne suivant le principe de l’organisation en «doubles pages», chacune consacrée à un thème et comportant des textes brefs des auteurs et un certain nombre de documents, avec toujours au moins une carte — on a bien affaire à un «atlas».

Les choix des thèmes et des documents sont en général pertinents; celui des cartes reflète les options des auteurs et aussi l’état du monde que l’on nous décrit. Les vues d’ensemble sur celui-ci sont nettement privilégiés: 16 double pages ne comportent que des cartes mondiales, 5 associent à des cartes mondiales des présentations d’espaces d’ordre de grandeur inférieur, 12 se situent entièrement à l’échelle nationale ou infra-nationale. Il est assez curieux, et on peut sans doute le regretter, que les documents à grande échelle soient rares: une seule carte, par exemple, sur la morbidité au niveau de la ville («Urbanisation et paludisme à Pikine»). En ce qui concerne les autres documents en dehors des cartes mondiales, ils portent surtout sur la France, (présente dans 7 double-pages) et, ce qui est sans doute symptomatique des problèmes de ce continent, sur l’Afrique.

D’une manière générale, la richesse et le traitement de la documentation sont assez évidents. Textes, cartes et graphiques se complètent bien et les réalisations matérielles des documents sont excellentes. On appréciera particulièrement la qualité des entrées du glossaire qui figure en fin du livre; les indications techniques indispensables pour une interprétation correcte des cartes sont très claires. C’est important dans un domaine où les incompréhensions sont fréquentes, notamment dans la mesure où l’on ne tient pas suffisamment compte des structures par âges. On peut donc être particulièrement reconnaissant aux auteurs de la netteté de leur définition des taux standardisés, et bien sûr de l’usage qu’ils en font dans leurs cartes.

Comme bien d’autres qualités, cet ouvrage rendra tous les services que l’on peut en attendre. On peut tout de même exprimer deux regrets:

- la construction d’ensemble suscite quelques interrogations: il était évidemment pertinent de commencer, par un chapitre sur les cinq grands déterminants de la santé. Pour la suite, les options des auteurs ne sont pas toujours bien compréhensibles. Il semble qu’on ait voulu distinguer des phénomènes «classiques» regroupés sous le titre «quelle mondialisation de la santé» et faire figurer des apparitions ou réapparitions récentes, ou des notions nouvelles dans une rubrique «liens ruptures et dépendances». Le choix de ces titres et la distribution des thèmes dans les chapitres ne sont pas toujours bien clairs. De plus, la dernière partie «Mutations des territoires, changements sanitaires» n’a d’autre homogénéité que le fait d’être consacrée essentiellement à la France. La difficulté de la mise en évidence de structures et de hiérarchies est évidemment une conséquence — le revers de la médaille — de l’organisation en doubles pages, mais on regrettera tout de même la place qui est faite à la transition épidémiologique, traitée de plus d’une façon assez discutable;

- le deuxième regret porte sur ce que l’on peut considérer comme une lacune importante: on ne nous dit rien du déficit féminin, notamment aux premiers âges de la vie, dans des sociétés aussi importantes par leur masse que celles de la Chine et de l’Inde. Effet à la fois d’une surmortalité des petites filles, phénomène ancien, et de l’avortement sélectif après échographie, pratique récente. On comprend mal les raisons qu’ont eues les auteurs de choisir d’ignorer ce phénomène. Sans doute ont-ils considéré qu’il relevait davantage de la démographie que des problèmes de la santé. Mais ce choix reste paradoxal, dans la mesure où il y a des pages sur la contraception, l’avortement, la mortalité infantile, tous phénomènes qui ont des liens avec celui du «manque de filles».

François Durand-Dastès