N°112

Le «collier de perles», une stratégie maritime chinoise

Ce poster a pour but de montrer les conséquences géostratégiques de la montée de la Chine comme puissance navale, avec ses retombées sur l’espace de l’Océan Indien. Pékin a, en effet, développé un grand nombre de projets en Asie méridionale, de manière à sanctuariser ses approvisionnements, avec des conséquences immédiates sur les relations avec ses voisins.

En janvier 2005, le Washington Times révélait l’existence d’un rapport classifié à destination de Donald Rumsfeld, secrétaire d’État à la Défense, qui identifiait une stratégie navale chinoise basée sur un réseau de ports militaires et d’appuis logistiques avec ses partenaires, depuis le Moyen-Orient à la mer de Chine, afin d’assurer ses approvisionnements énergétiques [1]. Rapidement repris par les médias américains, ce rapport popularise l’image du «collier de perles» pour décrire ce réseau de bases et de points d’appui.

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Le sixième Livre Blanc chinois sur la Défense Nationale (2008) donne en effet la priorité à la construction navale militaire. La flotte chinoise est maintenant la troisième du monde par le tonnage. Les chantiers navals construisent sous-marins, frégates, bâtiments amphibies, bâtiments de soutien. La marine chinoise est passée d’une marine côtière à une marine océanique.

Le développement de la marine de guerre chinoise et les politiques de défense proclamées contribuent-ils à la construction d’une stratégie maritime qui menacerait les équilibres géopolitiques de la mer de Chine du Sud et dans l’Océan Indien, et dont le «collier de perles» serait l’expression? Ce collier entoure l’Inde, rivale stratégique régionale. Outre la fonction d’appui à la marine de guerre et de sécurisation des approvisionnements, il se pourrait que ces bases soient équipées de dispositifs de surveillance électronique et de communication. Toutefois, ce «collier de perles» n’est qu’un essai d’interprétation de la stratégie maritime chinoise en contexte d’expansion, laquelle pourra se recomposer en fonction des relations avec ses voisins et avec les États-Unis. Désormais, ces derniers pensent la question stratégique dans l’Océan Indien en prenant en considération le paramètre chinois.

Cet Océan dont, rappelons-le, la Chine n’est pas riveraine, est un espace parcouru par les navires approvisionnant la Chine qui achète 40% de ses besoins en pétrole (dont 2/3 viennent du Moyen-Orient). Les échanges avec l’Afrique se développent aussi. Comment faire pour que ces échanges ne transitent pas tous par le détroit de Malacca, qui voit passer 80% des hydrocarbures importés par le pays?

La formation du «collier de perles» chinois n'est qu'un des scénarios possibles dans l’Océan Indien. Mais il reste crédible, car Pékin dispose de nouveaux arguments diplomatiques (piraterie, sécurisation des transports) pour légitimer la construction des bases à l’étranger. L’effet évident serait une montée de ses capacités de projection de ses forces militaires, et des possibilités de concurrence accrue avec les autres puissances régionales.

Cette analyse réalisée par le cabinet de conseil Booz Allen Hamilton était une commande du bureau de prospective du Pentagone.