Le ministère de l’Agriculture a mis en ligne cette année les données provisoires issues du recensement agricole mené en 2010 [1]. Cela a donné l’occasion au service statistique du ministère de l’Agriculture (Agreste) de repenser la question de l’accès aux résultats du recensement, en profitant de l’évolution des techniques depuis dix ans mais aussi en s’inscrivant dans le puissant mouvement actuel de mise à disposition des données publiques via Internet. Les institutions françaises ont depuis plusieurs années mené une politique cohérente de diffusion à titre gratuit d’ensembles importants de données, se mettant ainsi au diapason de pays qui ont été pionniers en ce domaine (Royaume-Uni, États-Unis, Canada, notamment). Aujourd’hui, tant le Géoportail de l’Institut géographique national que le site de l’INSEE regorgent de tableaux statistiques, ou de photographies aériennes et de cartes à toutes échelles.
C’est donc dans ce contexte que s’inscrit la démarche d’Agreste.
Agreste propose bien sûr, via son service de diffusion, de nombreux tableaux statistiques, mais a aussi eu recours à la boîte à outils Géoclip pour proposer une entrée cartographique dans les données [2]. L’Insee avait déjà, il y a quelque temps, utilisé les ressources de Géoclip pour proposer une visualisation cartographique de ses données. Agreste bénéficie aujourd’hui de la dernière version de cet outil, avec des fonctionnalités nouvelles, notamment la superposition avec des couches de données géographiques externes (Géoportail, mais aussi Google ou Open Street Maps).
1. L’écran d’accueil des cartes en ligne |
L’écran d’accueil du portail cartographique (fig. 1) propose deux pistes d’entrée dans les données: «afficher des cartes» ou «accéder à des premières données chiffrées». Si l’on suit le premier chemin, on peut procéder aisément, via une fenêtre ad hoc (fig. 2), à une sélection de thèmes, puis aller voir dans l’onglet «indicateurs» quelles sont les données disponibles correspondantes. Ce souci de proposer un chemin d’accès balisé doit être salué, et parlera à tous ceux qui cherchent dans les arborescences impénétrables du portail de telle ou telle institution les données dont ils ont besoin.
2. La fenêtre de sélection des données cartographiques |
Pour la suite, le travail de mise en cartes d’un indicateur est fait dans un strict respect de la sémiologie graphique, tout en permettant la sélection géographique, l’exportation.
On est particulièrement sensible au fait que l’outil gère très bien les proportionnalités de cercles (en fait des sphères), adaptant toujours les tailles au niveau de zoom choisi par l’utilisateur. De ce fait on a, à toutes les échelles, des cartes très lisibles, comme celle où l’on voit les «unités de travail annuel» (en fait l’intensivité du travail par unité de surface): une carte, qui, pour le quart Nord-Est de la France, fait bien apparaître le recours intensif à la main-d’œuvre dans les régions viticoles: Champagne, Bourgogne, coteaux alsaciens (fig. 3)…
3. L’intensivité en main-d’œuvre du travail agricole |
Malgré les qualités indéniables de cette ressource en ligne, on regrette quand même qu’au bout de quelques manipulations on soit parfois démuni pour aller plus loin ou revenir en arrière: il n’est pas évident de comprendre toujours où l’on en est de sa navigation.
Une autre caractéristique, hélas commune à nombre de ces outils: il est possible de combiner à peu près sans limite — et sans assistance — les indicateurs sur la carte, qu’il s’agisse des données issues du recensement agricole ou des données externes. Ces données sont certes très proprement calées les unes par rapport aux autres, ce qui permet effectivement leur juxtaposition dans le même système de projection. Mais cela conduit, si l’on n’y prend garde, à des empilements de variables assez désordonnés et ininterprétables. Le système nous permet ainsi de juxtaposer une carte choroplèthe à la commune (par exemple la part des salariés dans l’emploi), des données par cercles (nombre d’unités de travail annuel par commune) et la couverture Corine Land Cover (occupation du sol), tout en réglant un curseur de transparence, ce qui produit des résultats visuellement étranges (fig. 4).
4. L’étrange juxtaposition de trois indicateurs |
Il semble donc indispensable que toute la réflexion sur l’affichage des données géographiques par le biais d’outils de webmapping prenne en compte, et très sérieusement, cette question des juxtapositions et de l’assistance à l’utilisateur pour lui permettre de choisir des associations cartographiques pertinentes. Ce d’autant plus que ces outils ont pour vocation d’être accessible à des publics très diversifiés. Gardons pour la bonne bouche le résultat d’une juxtaposition d’une cartographie statistique à l’échelle de la France (métropole et outre-mer) avec le fond satellite du Géoportail. La Guyane et le Nord de l’Espagne se trouvent associés de manière plus qu’inattendue.
5. Quand l’Outre-mer français entre en collision avec la plaque ibérique |