Comprendre l’espace mondial: un atlas renouvelé
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La 6e édition de l’Atlas de la Mondialisation — la précédente datait de 2010 — est parue début 2013. Cette nouvelle ne peut que satisfaire étudiants et enseignants. Ce travail fouillé, fruit d’une équipe expérimentée, propose une analyse approfondie de la question de la mondialisation. Le plan est inchangé par rapport à l’édition précédente qui avait fait l’objet d’un compte rendu détaillé dans M@ppemonde: deux «clés de lectures» encadrent cinq chapitres thématiques et un dossier, cette fois-ci consacré aux États-Unis.
Cet ouvrage présente deux points forts:
- la qualité du travail d’ensemble, qui fait de cet atlas un outil pertinent et à jour pour entrer dans la question. On apprécie particulièrement le pari tenu de l’actualisation des données: très souvent les derniers millésimes récoltés sont 2010, 2011, parfois 2012; ce qui représente, on le sait, un travail très lourd de prospection des sources internationales.
- la variété de l’iconographie où l’on remarque particulièrement les excellents graphiques (opérations de maintien de la paix, p. 97-98; différends à l’OMC, p. 119) qui sont parfois articulés de manière expressive et ingénieuse à des cartes (États-Unis et prix Nobel p. 145).
Restent néanmoins quelques points sur lesquels cet atlas pourrait être amélioré. C’est surtout dans le domaine de la représentation que le travail pourrait être mené plus loin.
Ce sont peut-être les cartes qui sont les éléments les plus standardisés, même si un effort de variété est à signaler. Les planisphères centrés sur l’Europe et l’Afrique dominent nettement (plus de 90 fois: 80% des planisphères présentés). De mon point de vue, il en découle deux inconvénients sensibles:
- alors que la variété des graphiques de l’ouvrage permet de susciter l’étonnement et une attention renouvelée, la relative monotonie des représentations cartographiques, notamment quand il s’agit de cartes statistiques par États, provoque une certaine lassitude. On sait bien qu’il s’agit d’une gageure dans tout atlas, mais il est certainement possible de faire mieux dans ce domaine. Ce serait d’autant plus pertinent dans cet ouvrage que les deux premières sections de l’atlas accordent une grande importance à réflexion sur l’emploi des représentations graphiques et cartographiques (p. 8-19)
- cela contredit aussi le message d’ensemble de l’atlas: la variété croissante des organisations spatiales de l’espace mondial, qui laisse de plus en plus de place à des systèmes polycentriques et/ou à des déplacements des centres, ne devrait-elle pas aiguillonner le cartographe pour qu’il adapte les représentations en conséquence et qu’il amène son lecteur à regarder le monde sous le maximum d’angles possible?
Il est par ailleurs dommage que la petitesse des illustrations conduise les auteurs, et notamment les graphistes et les cartographes, à des acrobaties pour faire rentrer les figures, leur légende et leur commentaire dans un format trop contraignant. L’absence de hiérarchisation des écritures pèse sur la lisibilité de certaines figures. On est là aux limites techniques de la mise en page dans ce format (21 x 28, approximativement) et avec ce choix de maquette; la lecture en souffre.
Enfin, l’on ne peut que reprendre à son compte le regret que formulait déjà Bruno Modica dans son compte rendu de lecture de la 5e édition (site des Clionautes, octobre 2010): pourquoi ne pas proposer d’emblée cet ouvrage sous forme électronique? Cela permettrait d’articuler bien mieux édition papier — avec ses contraintes de format — et possibilités de l’édition électronique: cartes et graphiques affichés en pleine page, légendes et écritures plus lisibles et mieux hiérarchisées. C’est typiquement un ouvrage que l’on aimerait pouvoir utiliser sur une tablette, sans parler de la possibilité de vidéo-projection des figures en situation pédagogique. Il est donc à souhaiter pour la prochaine édition une parution simultanée dans ces deux formats.
Ces remarques ne doivent en rien altérer le jugement très positif que l’on peut porter sur cet excellent ouvrage.
Référence de l’ouvrage
DURAND M.-Fr., ANSART Th., COPINSCHI Ph., MARTIN B., MITRANO P., PLACIDI-FROT D. (2013). Atlas de la mondialisation. Paris: Presses de Sciences Po, coll. «Annuels», 198 p. ISBN: 978-2-7246-1265-3