Le Khumbu: une hétérotopie globale
Réalisé dans le cadre du 26e Festival international de géographie, ce poster a pour ambition d’illustrer le concept d’hétérotopie.
Le terme hétérotopie fût formulé par le philosophe Michel Foucault pour désigner des «lieux autres, des sortes d'utopies effectivement réalisées» au sein même de l’institution des sociétés (1967, p. 47). Mais à la différence des exemples génériques proposés par Foucault: les cimetières, théâtres, prisons ou villages de vacances, ce poster propose de s’intéresser à une hétérotopie spécifique et précisément localisée: la région népalaise de l’Everest, également appelée Khumbu.
Une mise en contexte cartographique et historique de la région du Khumbu encadre l’argumentation principale à savoir une illustration par image des six principes qui fondent les hétérotopies.
Situé à une altitude supérieure à 3 500 mètres, le Khumbu rassemble les différents principes propres aux hétérotopies. Pour la communauté Sherpa qui le peuple, le Khumbu est un beyul: un territoire sacré auquel seules les âmes pures ont accès. Pour les occidentaux, il demeura longtemps une terra incognita. Aujourd’hui encore, cette région repose sur de multiples systèmes d’ouverture et de fermeture qui en autorisent et en restreignent l’accès: altiport périlleux, passage de ponts suspendus, de portes sacrées, de check-posts militarisés… Gagnant de l’altitude dans un cadre empreint de religiosité, pour les trekkeurs et alpinistes qui le fréquentent, le Khumbu fonctionne comme un espace d’illusion et de compensation par rapport aux spatialités et aux temporalités qu’ils vivent d’ordinaire.
Espace propice aux rêveries et aux fantasmes, le Khumbu polarise rapidement de nombreux touristes venus du monde entier. Il devient une hétérotopie globale. De fait, ce territoire se retrouve au cœur d’enjeux pouvant paraitre contradictoires du point de vue des différents acteurs qui le composent. Pour certains, le tourisme apparait comme une ressource extrêmement lucrative. Il s’agit d’ouvrir cet espace au plus grand nombre. Pour d’autres, il faut avant tout le protéger dans ses dimensions culturelles, environnementales ou sacrées. Cette diversité de fonctionnalités attribuée à l’espace donne naissance à une hybridité qui illustre bien la situation dans laquelle la communauté Sherpa se retrouve aujourd’hui: tiraillée entre le souhait de conserver ses valeurs et ses pratiques traditionnelles et son désir d’ailleurs et de mondialité.
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Bibliographie
FOUCALT M. (1967). "Des espaces autres, hétérotopies". Conférence au cercle d'études architecturales, 14 mars 1967. In Architecture, mouvement, continuité, n°5, octobre 1984, p. 46-49 [PDF]