La population indienne en 2011: anciennes et nouvelles différenciations spatiales
Du fait de l’ampleur de sa masse démographique, tout ce qui se passe en Inde est lourd de conséquences sur nombre de grands problèmes planétaires, comme l’alimentation ou les émissions de gaz à effet de serre. Il y a dans la position mondiale de l’Inde comme une démesure, qu’il est coutumier d’apprécier en rappelant par exemple que l’Inde représente 17,5% de la population mondiale. Mais cette position se décline sous des formes multiples et présente des aspects qui sont moins couramment évoqués. Ainsi bien que l’Inde soit justement considérée comme peu urbanisée (taux d’urbanisation de 31%), l’effectif de sa population urbaine est nettement supérieur à la population totale des États-Unis; ou encore, le premier État de la fédération, l’Uttar Pradesh, avec 200 millions d’habitants, viendrait, s’il était un État souverain, au cinquième rang des pays du monde, juste devant le Brésil (et, incidemment, pendant quelques années récentes, son gouvernement a été dirigé par une femme de basse caste).
La publication des premiers résultats du recensement de 2011 offre l’occasion de faire le point sur l’état de la population indienne, ses caractères, sa dynamique, et aussi de reprendre quelques considérations sur les indications que les résultats du recensement soulignent ou révèlent quant aux structures spatiales du pays (Durand-Dastès, 1995; Guilmoto, 2006; Landy, 2010; Saglio Yazimirsky, 2001).
Le choix des documents présentés ici dépend de la documentation disponible et de l’intérêt particulier de certaines questions. Nous avons tenu à prendre en compte les résultats qui concernent des échelles spatiales fines, celle des districts, qui sont près de 600. Les données par États (annexe) et par territoires sont plus rapidement fournies après chaque recensement et plus faciles d’accès, mais elles souffrent de la très grande inégalité de taille des entités et de la très grande dimension de certaines d’entre elles. Au moment de la rédaction de cet article, les renseignements disponibles à l’échelle des districts concernaient les masses de population, les taux de croissance, la composition par genres et l’alphabétisation.
Ces données permettent de répondre à des questions fort actuelles en ce qui concerne la démographie de l’Inde. Celle d’abord du ralentissement de la croissance démographique, un phénomène relativement nouveau. L’étude de la variation spatiale de la croissance dans le temps peut présenter un double intérêt: d’une part, aider à comprendre le phénomène global lui-même, et d’autre part, mettre en évidence des structures de l’espace indien.
Par ailleurs, l’Inde, comme plusieurs autres pays de l’Asie du Sud et de l’Est, est caractérisée par un taux de féminité des populations très faible par rapport aux tendances mondiales. La variation dans l’espace de ces taux est révélatrice des conditions de vie des femmes, et s’enrichit de la confrontation avec d’autres indicateurs, comme les taux d’alphabétisation selon le genre. Ce travail d’association des variables cartographiées complète le tableau de structures significatives qui suggère des hypothèses explicatives, notamment par des mises en relation avec d’autres caractères connus de l’espace indien.
Dans la mesure du possible, on a introduit une dimension diachronique en comparant les données de 2011 avec celles des deux, voire des trois recensements précédents. Une introduction qui, assez banalement, révèle le jeu combiné des changements et des permanences, des conjonctures et des enracinements. Elle permet aussi de s’interroger sur les processus à l’œuvre dans l’évolution de la différenciation spatiale, notamment les processus de diffusion.
Le poids de l’Inde
La concentration de 37% de la population mondiale en Chine et en Inde (respectivement 19,5% et 17,5%) peut être considérée comme un des traits majeurs de la géographie du monde. C’est un phénomène qui a des racines anciennes, un vieux fond de peuplement fort, sur lequel s’est greffée une croissance notable depuis un siècle. On ne reviendra pas longuement sur l’enracinement dans le temps long. Il peut être mis en rapport avec les interactions entre le peuplement et des systèmes agricoles dotés d’une productivité par unité de surface relativement forte par rapport aux autres systèmes «traditionnels», que l’on dit parfois issus de la révolution néolithique, et caractérisés en même temps par de très grands besoins en force de travail humain (pour une formalisation de cette interaction, Durand-Dastès, 1995).
La grande croissance de la population indienne a commencé assez tardivement, dans les premières décennies du XXe siècle, pour s’accélérer après la deuxième guerre mondiale et rester à des niveaux élevés. C’est seulement après 1981 qu’un fléchissement s’est manifesté, qui semble en train de s’accentuer (tableau 1).
1. La fin de l’explosion démographique (1955-2011) |
La figure 1, qui donne une image plus détaillée pour le dernier demi-siècle, montre bien comment, autour des années 1980, l’Inde a commencé sa phase de sortie de l’explosion démographique, telle qu’elle est décrite dans le modèle de la transition démographique. Un classement fondé sur les mêmes données que celles utilisées pour la figure 1 portant sur 190 pays nous a permis de préciser la position relative de l’Inde dans le monde. Dans une partition en huit groupes, l’Inde se situe avec des pays d’Asie du Sud, du Moyen-Orient et du Maghreb, ainsi qu’avec les États andins et le Mexique.
La conséquence immédiate de la masse considérable de la population est la valeur élevée de la densité, sur l’ensemble du pays, à l’exception de la bordure himalayenne. En contraste marqué avec les autres pays du monde de taille et de masse comparables, et particulièrement avec ceux de l’ensemble «BRIC» (Brésil, Russie, Inde, Chine), l’Inde fait figure d’espace plein, sans vastes espaces susceptibles de mise en valeur avec de nouvelles options techniques. La figure 2 montre certes des inégalités, mais il convient de souligner que, toujours en dehors de hautes montagnes, les valeurs des régions relativement faibles apparaîtraient comme relativement fortes sur des cartes de pays comparables par leurs milieux physiques ou leurs économies, que ce soit en Afrique ou en Amérique latine.
2. Densité de la population en 2011 |
Ceci dit, la figure 2 montre une structure de la répartition de la population qui est très stable sur le temps long, une stabilité elle-même liée pour une très large part à l’efficacité des systèmes agricoles. Ce n’est pas le lieu de commenter longuement cette organisation bien connue. La carte montre l’existence de deux espaces qui peuvent être considérés comme «périphériques», en donnant au terme une signification générale, en suivant par exemple Alain Reynaud (1981). Une périphérie externe, celle de la bordure montagneuse, incluse dans l’Union indienne au nord-ouest (Jammu et Kashmir) et au nord-est. Une périphérie «interne», suivant un axe qui va du Rajasthan à l’Odisha, qui associe dans une continuité géographique des régions qui se sont mal prêtées aux peuplements agricoles massifs et continus, plaines sèches au nord-ouest, collines et moyennes montagnes très arrosées mais aux sols médiocres au sud-est. On voit apparaître dans cette périphérie interne quelques espaces plus «forts»: des taches d’urbanisation et d’industrialisation, et des couloirs qui la traversent, le principal étant celui qui suit la frontière entre le Rajasthan et le Madhya Pradesh. Des auteurs comme Frédéric Landy (2007) ont souligné récemment l’importance des «couloirs» dans l’organisation de l’espace en Inde. Les fortes densités se trouvent en plages discontinues le long des côtes de la péninsule, surtout avec les deltas de la côte Est, et bien sûr tout le long de la plaine du Gange. L’intérieur de la péninsule est en position intermédiaire. On reviendra plus loin sur la position des grandes agglomérations urbaines et le semis de villes plus isolées, notamment de l’intérieur.
La densité démographique est certes un bon descripteur de la répartition de la population sur un territoire, mais elle ne permet pas de mettre en évidence le degré de concentration de cette distribution, une donnée qui a son importance. Pour la traiter, on dispose d’outils comme des courbes de concentration, des indices divers et des cartographies telles que celle qui a été utilisée pour la figure 3. La concentration de la population indienne reste assez stable: les courbes de concentration construites à partir des données population/superficie pour 2001 et 2011 se superposent à peu près complètement, si bien qu’on ne les a pas reproduites ici, l’intérêt de courbes et des indices résidant surtout dans la possibilité qu’ils offrent d’effectuer des comparaisons. Les concentrations majeures (première carte, 20% de la population sur 9% de la superficie) mettent en évidence le rôle des villes et des deltas de l’est, tandis que la deuxième ajoute les régions de forte tradition agricole, et que la troisième met en valeur et situe les périphéries dont il a été question ci-dessus. Avec 20% seulement de la population, elles s’étendent sur 36% de la superficie...
3. Concentration de la population de l’Inde en 2011 |
Malgré l’augmentation de la population, donc de la densité, ces premiers documents renvoient encore et surtout à une organisation de l’espace indien bien enracinée dans les temps longs de la nature et de l’histoire. Mais parmi les apports du recensement récent, c’est plutôt le changement qui attire l’attention en matière de croissance, d’urbanisation, d’évolution socio-culturelle.
Le ralentissement de la croissance
Une baisse du taux global de croissance démographique s’est manifestée à partir de la période intercensitaire 1981-1991 (tableau 1), après des décennies d’augmentation ou de stabilité à des valeurs élevées. Il y a donc eu un renversement de tendance significatif en cette fin du XXe siècle. La politique — prudente — d’encouragement au contrôle de la fécondité, adoptée très précocement mais longtemps d’une efficacité modérée, a commencé à mieux faire sentir ses effets dans le contexte de transformations économiques et sociales, accélérées depuis les années 1990.
La transformation a eu lieu selon un processus différencié dans l’espace indien; une différenciation dont l’étude peut fournir des renseignements sur le processus lui-même, et sur les structures géographiques de l’Inde, et pas seulement dans le domaine de la démographie. On a donc élaboré la figure 3 qui est composée de trois cartes représentant les taux de croissance aux trois dernières périodes intercensitaire, puisque l’aspect diachronique est ici essentiel. Ces cartes utilisent le découpage des districts de 2001 pour faciliter les comparaisons [1].
4. Taux de croissance démographique, 1981-1991 |
5. Taux de croissance démographique, 1991-2001 |
6. Taux de croissance démographique, 2001-2011 |
Sur les trois cartes, on repère bien des différenciations ponctuelles, qui reflètent les fortes croissances des districts contenant les villes majeures, un aspect fondamental sur lequel il faudra revenir. Mais l’aspect le plus frappant est la différenciation entre des aires souvent étendues et dotées d’une cohérence spatiale marquée.
Entre 1981 et 1991 (fig. 4), les taux les plus faibles sont observés dans le sud de l’Inde et dans les régions le long de la baie du Bengale, un ensemble étendu assez continu, auquel viennent se joindre quelques districts en groupes plus restreints, dans le Gujarat et l’extrême nord-ouest, entre la région de Delhi et la frontière pakistanaise. Les taux restent plus forts dans un grand ouest, qui englobe incidemment une grande partie de la «périphérie intérieure», et dans les montagnes du nord.
Pendant la décennie suivante (fig. 5), l’évolution conduit à une répartition très organisée des taux de croissance, avec une opposition nette de part et d’autre d’une ligne allant de la région de Mumbaï (Bombay) jusqu’au nord du Bengale occidental, et toujours les valeurs les plus fortes le long de la frontière pakistanaise, au Rajasthan.
Après 2001 (fig. 6), l’organisation assez simple de la décennie précédente se défait pour une large part, les contrastes majeurs opposent des aires étendues avec des taux au-dessous de 20% à des districts et des groupes de districts urbains et à quelques aires cohérentes, moins étendues comme l’ouest du Rajasthan et l’est de la plaine du Gange; et l’on voit apparaître, ponctuellement, des évolutions négatives.
La succession des trois cartes suggère l’existence d’un processus de diffusion, à partir d’un état initial où l’innovation que représente la baisse de la croissance est d’abord concentrée dans le sud, pour ensuite se diffuser vers le nord-est puis vers le nord, accentuant ainsi des contrastes entre les zones atteintes et non atteintes par le processus. Ensuite, dans la dernière des trois étapes envisagées, il apparaît une certaine tendance à l’homogénéisation. L’hypothèse demande cependant à être confirmée et surtout complétée.
L’étude d’un processus de diffusion implique une hypothèse sur le mode de transmission de l’innovation, mais aussi éventuellement l’identification de lieux de première apparition de celle-ci, et la mise en évidence du rôle de «récepteurs» potentiels, dont la présence ou l’absence est susceptible d’orienter les courants de diffusion. Le rôle de ces «récepteurs potentiels» vient se combiner à celui de la distance. Les hypothèses faisant état, d’une part, d’un processus de diffusion par contagion et, d’autre part, d’une intervention de facteurs de différenciation préexistant au jeu de la diffusion peuvent parfaitement ne pas s’exclure mutuellement et être complémentaires.
Bien que la période observée ici soit relativement courte, les cartes suggèrent fortement qu’il y a eu jeu d’un processus du type «contagion». On est en droit de supposer qu’il a tenu un grand rôle. Mais il faut aussi rendre compte des raisons qui ont expliqué pourquoi et comment le processus a commencé dans le sud, et ensuite quels sont les facteurs autres que la distance qui sont intervenus dans le processus de diffusion. Notamment, ceux qui ont conduit à la dissymétrie entre le nord-est plus ouvert au changement que le nord-ouest. Pour l’une et l’autre question, de nombreuses hypothèses ont été avancées, qu’il est impossible de discuter en détail dans le cadre de cet article. On peut cependant retenir qu’on a affaire à des combinaisons multi-causales.
Ainsi, en ce qui concerne le caractère précoce de l’innovation au Kerala qui fait figure de point de départ du processus, on peut faire état d’une série d’interactions entre baisse de la fécondité, taux d’alphabétisation (notamment des femmes), ouverture aux idées politiques avancées, le tout facilité par une position qui a mis la région en contact avec l’extérieur, et aussi par l’héritage d’influences anciennes, constructions politiques autochtones efficaces, voire anciennes structures matriarcales (Durand-Dastès, 1995).
L’adoption plus ou moins rapide de l’innovation, la présence de «récepteurs potentiels» (en matière de démographie) montre une opposition assez claire entre, en gros, le sud et l’est de l’Inde, et le nord et l’ouest. Les oppositions à petite échelle, entre espaces de grandes dimensions tels que ceux que nous rencontrons ici, sont souvent moins bien documentées dans la littérature sociologique et anthropologique que les études à grande échelle. On peut cependant faire état de ce que dit Amartya Sen (2007) des sociétés aux structures plus rigides dans le nord et l’ouest. Une synthèse claire est offerte par Christophe Jaffrelot (2005) à propos de différences marquées dans les rapports des hautes castes avec les castes moyennes et inférieures entre le nord et le sud du pays. Il en étudie l’effet sur les comportements politiques, mais ils peuvent très bien avoir des effets hors de ce champ.
On peut évidemment se demander quel est le rôle de la géographie des religions et des pratiques religieuses dans la différenciation qui nous intéresse ici. Les indications sur cette influence se situent dans deux domaines.
En premier lieu, des indices indirects suggèrent qu’un hindouisme de type plus «traditionaliste» est davantage implanté dans le nord et l’ouest que dans le sud et l’est. Un fait qui est relevé par Amartya Sen dans le texte déjà cité, et que l’on serait tenté de voir confirmé par les résultats électoraux du parti hindouiste-nationaliste BJP (Bharatiya Janata Party – «parti du peuple de l’Inde»). Il est globalement assez bien implanté dans le nord-ouest, et, surtout, il a une difficulté certaine à pénétrer durablement dans un domaine englobant l’extrême-sud et les régions bordières de la baie du Bengale, celles où la baisse de la croissance s’est diffusée le plus rapidement.
En second lieu, il est avéré par des enquêtes sur les temps longs que les taux de fécondité et de croissance sont plus forts chez les musulmans que chez les fidèles de toutes les autres religions de l’Inde, notamment que chez les hindous, et ils ont une tendance à être plus nombreux dans le nord et l’ouest (Sachar Commission, 2006). Ces constatations suggèrent une influence possible de la répartition des musulmans sur celle des taux de croissance. Mais la portée de cette suggestion est atténuée par deux faits: d’abord, les analogies entre les cartes des effectifs de musulmans et les taux de fécondité ne sont que très générales; les très nombreuses exceptions limitent la corrélation entre les phénomènes. Ensuite, fécondité et croissance chez les musulmans varient dans l’espace comme celles des populations hindoues. Les corrélations au niveau des États entre les valeurs pour les musulmans et les hindous que l’on peut calculer à partir de la source citée sont nettement significatives. Ce qui tend à montrer le rôle majeur d’un ensemble complexe de caractères des sociétés locales, où le poids de l’islam peut avoir une part, mais seulement une part.
Tous ces éléments mettent en cause des structures sociales enracinées dans les temps longs, ainsi que des évolutions et des contacts anciens. Mais les ensembles ainsi constitués par le jeu des héritages et de la diffusion sont remarquablement hétérogènes du point de vue économique. Il y a par exemple des différences affirmées dans le domaine du nord-ouest entre l’ensemble Delhi Punjab - Haryana d’une part, le Rajasthan et l’est de la plaine du Gange d’autre part. Il en va de même, dans l’autre grand domaine distingué, avec les nuances entre les périphéries péninsulaires et l’intérieur. Ce qui ne veut sans doute pas dire que le niveau économique soit sans effets sur la démographie, mais son influence peut s’exercer à travers des médiations complexes qui modifient les rapports spatiaux.
Croissances urbaines
Le taux global d’urbanisation reste faible en Inde et progresse plutôt lentement, puisqu’il est passé de 25,7 à 27,8% de la population de 1991 à 2001 et de 27,8 à 31,0% de 2001 à 2011, une accélération modérée qui laisse l’Inde au-delà du 150e rang sur 195 pays pour cet indicateur. La capacité des campagnes indiennes à retenir une part relativement forte de la population est un sujet qui suscite pas mal de débats depuis quelques années. Ce fait est partiellement masqué par les nombres absolus puisque, selon une évidence que l’on oublie un peu parfois, les valeurs qui résultent de pourcentages faibles sur des totaux très forts atteignent des niveaux élevés: 377 millions d’urbains en 2011, 91 millions d’habitants de plus dans les villes en 2011 par rapport à 2001.
7. La présence de grandes villes dans les districts (2001 et 2011) |
La «présence urbaine» sur le territoire indien est très inégale; on a choisi de la décrire d’abord par une carte au niveau des districts, classés selon la population de leur ville principale en 2001 et 2011 (fig. 7) puis par une représentation du semis des villes de plus de 200 000 habitants (fig. 8). Les caractères de la métropolisation sont décrits par les figures 9 et 10. Pour évaluer les dynamismes des villes (fig. 8) et des agglomérations millionnaires (fig. 9), on a préféré à la cartographie des taux de croissance celle d’un indicateur qui permet de situer l’évolution de chaque entité par rapport à une tendance observable pour l’ensemble des deux séries de données, soit les résidus d’une régression linéaire entre les effectifs de 2011 et ceux de 1991 pour les villes et de 2001 pour les agglomérations (encadré). Pour celles-ci, on a adopté les définitions du Census of India.
Du point de vue de la présence urbaine, on observe une certaine stabilité. On voit bien que les districts qui font l’«acquisition» entre 2001 et 2011 d’une ville de rang supérieur (fig. 7, cartons 2, 4 et 6) sont, dans la très grande majorité des cas, adjacents à des districts déjà «bien» pourvus. Ceci est particulièrement net pour les districts qui acquièrent une ville dont la population est comprise entre 200 000 à 500 000 habitants, puisqu’ils sont tous accolés à des districts où il y avait déjà une ville d’au moins 200 000 habitants en 2001.
Les grands traits que conserve cet ensemble urbain de base offrent quelques aspects attendus. Les régions «périphériques», au sens défini ci-dessus, sont faiblement urbanisées dans l’ensemble. Les «périphéries internes» offrent un type d’urbanisation assez particulier, dont la faiblesse globale contraste avec l’existence de quelques grandes villes, celles qui s’alignent le long du corridor Delhi-Gujarat dont il a été fait état, et surtout de cinq villes «millionnaires», capitales d’État ou centres d’industrialisation hors de ce corridor.
Dans le reste de l’Inde, les inégalités de la présence urbaine présentent quelques traits, dont certains restent dans une large mesure des sujets d’interrogations. Il en est ainsi des semis assez denses de l’Inde du Sud et du Gujarat, du contraste entre l’est et l’ouest du centre de la péninsule, et dernier aspect mais pas des moindres, du caractère assez lâche du réseau de la plaine du Gange.
8. Villes majeures et modalités de croissance de 1991 à 2011 |
Les dynamismes relatifs que mettent en évidence les résidus de régressions cartographiés sur la figure 8 ont une répartition assez contrastée. En dehors de la plaine du Gange, où les dynamiques différent sensiblement entre villes voisines, il apparaît des oppositions nettes entre des ensembles spatiaux cohérents. Les villes millionnaires espacées et isolées (pas de villes entre 200 000 et 1 million d’habitants) de la périphérie interne ont une forte dynamique relative, à l’opposé de ce qui se passe (hors des métropoles) dans les vastes espaces à urbanisation dense et cohérente du sud et de l’ouest de la péninsule. À quelques exceptions près, comme celle de Coimbatore aux confins du Tamil Nadu et du Kerala, les dynamismes sont inférieurs à la tendance Inde-entière (résidus négatifs).
Les principaux points forts de l’Inde urbaine restent évidemment l’ensemble des grandes agglomérations métropolitaines, dont on a rappelé la structure et essayé de décrire le dynamisme avec la figure 9; la figure 8 permettant des comparaisons significatives.
Les situations actuelles et les héritages permettent de distinguer trois composantes dans l’espace des métropoles de l’Inde: des espaces qui demeurent polycentriques avec quelques très grands centres, dans la plaine du Gujarat et au Kerala, les quatre grandes agglomérations de ce que l’on a pu appeler le «quadrilatère métropolitain» de base, Mumbaï (Bombay), Delhi, Kolkata (Calcutta) et Chennai (Madras). Enfin les deux nouvelles venues au palmarès du dynamisme, Bangalore et Hyderabad.
À vrai dire, l’aire urbanisée du Kerala pose quelques problèmes, et son aspect sur la carte tient un peu de l’artefact. En effet, l’ensemble des plaines de la région a une telle densité humaine qu’il a semblé loisible aux autorités locales et aux recenseurs d’intégrer des districts entiers dans les agglomérations urbaines, qui ont été ainsi dotées de masses et de taux de croissance qui faussent un peu la perspective. D’autre part, les grandes villes dynamiques du centre du Gujarat, autour du golfe de Cambay, peuvent apparaître comme une partie de l’agglomération de Mumbaï. Il est certain que les rapports sont importants entre les unes et l’autre; mais les distances sont notables, les centres du Gujarat gardent une autonomie certaine — c’est bien une interaction qu’il y a et qu’il y a eu entre deux domaines individualisés.
9. L’évolution des agglomérations millionnaires de 1991 à 2011 |
Faute de place, on ne reviendra pas ici sur les success stories qui font de Bangalore et Hyderabad des représentants bien connus de la «shining India» et de ses activités modernes — ces deux cas, avec leurs similitudes et leurs différences offrent pourtant de beaux sujets de réflexion sur l’explication des localisations. Ce qui est dit dans la Géographie Universelle sur les bases de ces évolutions demeure valable pour l’essentiel (Durand-Dastès, 1995).
Contrastant avec ces évolutions brillantes, les quatre grandes métropoles, tout en croissant fortement, tendent à se situer un peu en retrait de la tendance pan-indienne, comme le montrent les résidus négatifs par rapport à l’expression mathématique de cette tendance (relation linéaire entre les populations de 1991 et de 2011). C’est le cas pour toutes les périodes et tous les types d’espace pour Kolkota et Mumbaï. Mais il y a plus de nuances dans le cas de Delhi et de Chennai. Pour toutes deux, l’aire urbaine apparaît avec des résidus négatifs pour la période 2001-2011, mais quand on passe à une période plus longue, et surtout quand on passe au cadre de l’agglomération, le signe de la relation change. C’est là un effet de l’incorporation, dans l’entité traitée, des villes dynamiques qui entourent la ville-centre. Le phénomène est très visible à Delhi, où l’on a incorporé à l’agglomération des villes à forte croissance situées sur les bordures du district fédéral, bien visibles sur la figure 8.
Cet effet n’a pas pu jouer avec la même ampleur à Mumbaï. Bien que des villes périphériques très peuplées aient été incorporées à l’agglomération, l’extension de celle-ci vers l’intérieur a été limitée par la barrière des Ghâts, et c’est à près de 200 km au sud-est qu’a été rejeté le puissant ensemble urbain en forte croissance de Pune-Pimpri-Cihnchewad, très intégré à l’économie mumbaïte, mais qui reste hors de l’agglomération. Le cas de Kolkota est différent; ici se manifeste plus nettement une certaine faiblesse économique. Les villes périphériques ont, comme la cité centrale, des croissances relativement faibles (fig. 8), et leur incorporation à l’agglomération n’a pas pu améliorer la position de l’ensemble.
L’Inde est une terre de vieille urbanisation. Mais son réseau était profondément marqué par les implantations littorales des créations coloniales; une empreinte qui s’atténue peu à peu, avec la diversité d’évolutions commencées il y a plusieurs décennies, mais accentuées lors de la dernière.
L’accentuation récente d’un autre phénomène aux racines anciennes est aussi très spectaculaire: la masculinisation de la population.
Des femmes – inégalement – manquantes
L’expression «Les femmes manquantes» a été popularisée — peut-être inventée — par un Indien, Amartya Sen: «more than 100 millions women are missing» (Sen, 1990). Il y a de bonnes raisons pour cela, puisqu’un des caractères fondamentaux de la population indienne est la faiblesse du taux de féminité, 936 femmes pour 1 000 hommes, contre 983 pour l’ensemble du monde. Cette valeur mondiale est considérablement abaissée par le poids de l’Inde et de la Chine; si l’on effectue le calcul sur les populations de l’ensemble des pays moins celles de l’Inde et la Chine, le taux de féminité «mondial» passe de 983 à 1 016; les taux sont de 1 075 pour l’Europe, 1 025 pour l’Amérique latine, autour de 1 010 pour de grandes parties de l’Afrique: les contrastes sont des plus nets.
Classée au 214e rang sur 226 pays, l’Inde est parmi les pays les plus mal placés, avec la Chine et quelques autres voisins de l’Asie du Sud et l’Est, et des pays du Moyen-Orient, qui doivent, eux, en partie leur classement à une forte immigration masculine – ce qui n’est le cas ni de l’Inde ni de la Chine.
Il est difficile de ne pas invoquer, comme causes directes de cette situation, une nette surmortalité féminine, elle-même résultat de carences en matière de soins et d’alimentation, de la dureté des travaux imposés, et aussi de franches maltraitances et violences.
Ces conditions qui affectent toutes les classes d’âge sont encore aggravées dans le cas des très jeunes enfants — le taux de féminité des 0-6 ans (914 filles pour 1 000 garçons) est inférieur à celui de l’ensemble. Il implique, entre autres, le développement, avec l’échographie, de l’avortement sélectif aux dépens des embryons féminins. Le cas du taux des enfants est particulièrement grave du point de vue de l’évolution: si l’indice global remonte légèrement depuis 1967, après une baisse continue de 1950 à cette date, la baisse est régulière pour les 0-6 ans (de 927 à 914 de 2001 à 2011).
Les causes générales de cet aspect de la condition féminine, et des violences qu’elles subissent, posent des questions difficiles. On s’interroge en particulier sur les facteurs de la convergence qui crée des situations semblables dans des pays certes comparables par bien des points, mais dont les organisations sociales sont assez différentes. Dans le cas de l’Inde, on souligne, à juste titre le rôle majeur du régime dotal, qui pénalise les familles où les filles sont nombreuses. Il est assez spécifique de l’Asie du Sud, comme l’ont bien montré des travaux de comparaison des prestations matrimoniales à l’échelle mondiale (Testart et al., 2002). Mais pour l’Inde même, il peut y avoir d’autres facteurs, et des explications, différentes d’une partie à l’autre du domaine asiatique, interviennent probablement.
Pour essayer d’apporter quelques éléments sur les aspects de ce phénomène et les explications possibles, il peut être utile d’étudier les disparités internes de l’espace indien, décrites par les figures 10 et 11.
10. Taux de féminité 2001 | 11. Taux de féminité 2011 |
À priori, les disparités peuvent dépendre de deux facteurs: la surmortalité féminine et les mouvements migratoires. Les migrations internes à longue distance, d’une région à une autre, sont essentiellement masculines, ce qui tend à baisser les taux de féminité dans les régions d’immigration, et à les relever dans les régions de départ. Les données sur les migrations internes sont toujours publiées tardivement, et il sera impossible, pour quelque temps encore, de procéder à des analyses fines pour faire la part de ces effets migratoires, par rapport au rôle de la surmortalité féminine. L’influence des mouvements de population est évidente sur les taux particulièrement bas des grandes villes, tandis qu’ils peuvent contribuer à relever ceux de régions connues comme source d’émigration comme le Kérala. Mais la plupart des régions de faible féminité tendent plutôt à présenter des déficits migratoires, et par ailleurs les migrations ne peuvent pas être invoquées pour expliquer les différences des taux pour les 0-6 ans. On a donc le droit de considérer que, pour l’essentiel, les différenciations spatiales des taux de féminité reflètent les inégalités dans les conditions de vie imposées aux femmes.
12. Taux de féminité. Enfants de moins de 6 ans, 2011 |
Les cartes de ces taux pour 2001 et 2011 (fig. 10 et 11) montrent une répartition nettement organisée en ensembles spatiaux cohérents (Oliveau, 2010), et une stabilité certaine — les deux cartes se ressemblent beaucoup. Elles soulignent l’extension limitée des domaines où le taux de féminité est supérieur à 1 000, une opposition entre le sud, particulièrement les régions côtières de la péninsule, et toute une partie nord et nord-ouest de l’Inde des plaines; avec une exception dans le sud du Rajasthan. Les zones de féminité forte s’étalent vers l’intérieur dans le nord-est de la péninsule, et se retrouvent en taches dispersées dans les bordures montagneuses. On retrouve à peu près les mêmes traits majeurs dans la répartition des taux pour les 0-6 ans (fig. 13). Les taux ont des valeurs particulièrement basses dans les régions les plus prospères, au nord-ouest de la plaine du Gange, avec l’ouest de l’Uttar Pradesh, le district fédéral de Delhi, le Haryana et le Punjab, les plaines du Gujarat, un vaste arrière-pays de Mumbai (l’essentiel du Maharashtra). Ce sont là des régions dynamiques, dont les populations, plus riches, ont plus que d’autres l’accès à des échographies, souvent destinées à permettre l’élimination des embryons féminins. Ces échographies se paient d’autant plus cher qu’elles se situent dans le cadre d’une semi-clandestinité, puisque des mesures destinées à limiter les pratiques sélectives ont été prises par le gouvernement.
L’espace où les conditions paraissent moins défavorables aux femmes semble avoir des racines anciennes. Les démographes du Census of India ont calculé, à partir des données détaillées, les valeurs d’un certain nombre de variables, dans le cadre reconstitué des États actuels, pour tous les recensements depuis 1901; le travail a été fait notamment pour les taux de féminité. En calculant pour chaque État et pour chaque recensement les écarts à la valeur pour toute l’Inde. En additionnant ensuite ces écarts, on met l’accent sur les tendances spécifiques à long terme au niveau des États — ce qui a été fait pour réaliser la figure 13. Les ressemblances entre les grands traits des répartitions et celles qui sont visibles sur les figures 10 à 12 suggèrent qu’elles sont dotées d’une certaine permanence, de racines anciennes.
13. Féminité relative des États indiens sur le long terme, 1901-2011 | 14. L’alphabétisation des femmes |
Les informations sur la condition des femmes données par les taux de féminité peuvent être complétées par celles produites par le taux d’alphabétisation des femmes, un autre indicateur disponible dans le recensement (fig. 14); on a ajouté une comparaison avec les taux masculins par la méthode des résidus.
On retrouve ici quelques traits majeurs des répartitions précédentes avec quelques nuances. En particulier, les taux élevés et les résidus positifs sont très caractéristiques des régions les plus dynamiques du point de vue économique: essentiel du Maharashtra, plaines du Gujarat, région Delhi-Haryana-Punjab ainsi que les métropoles hors de ces espaces. L’«avantage» féminin relatif (résidus positifs) dans l’extrême sud-ouest et dans les États du nord-est bordier est fortement souligné par la carte.
Au total, tous ces documents sur la géographie de la condition féminine renvoient à des processus et à des situations que nous avons déjà rencontrés et qui posent les mêmes problèmes: des processus de diffusion à partir de foyers méridionaux et des différences socio-culturelles profondes.
Dans des études très solidement argumentées sur la répartition des taux de féminité, Christophe Z. Guilmoto (Guilmoto, 2008a et 2008b) décrit le jeu d’un processus de diffusion analogue à celui que nous avons rencontré ci-dessus à propos de la croissance démographique. Il identifie un processus de contagion et des aires de départ, faisant état pour celles-ci d’enracinements anciens: «Il semble vraisemblable que la discrimination a pris pied initialement dans les zones historiques de forte discrimination envers les filles, régions occidentales s’étendant du Gujarat au Pendjab où l’infanticide féminin combattu par les autorités coloniales était le plus fréquent. Mais la discrimination a visiblement essaimé de proche en proche autour de ces foyers pour conquérir de nouveaux espaces et recouvrir une vaste part du territoire national.». Puis il montre le rôle des potentiels d’adoption qui orientent et limitent la diffusion: «La composition ethnico-religieuse de la population a facilité l’introduction rapide des nouvelles attitudes discriminatoires dans certaines zones, mais elle a créé ailleurs un mur de verre, freinant la progression de ces nouvelles pratiques dans près de la moitié du pays. Cette résistance des systèmes sociaux dans les régions du sud ou de l’ouest explique pourquoi la discrimination envers les filles ne s’est pas étendue plus largement, comme en Chine.». Bien sûr, il convient d’être très prudent, mais le «mur de verre» que mentionne Christophe Z. Guilmoto ressemble assez, par son tracé qui sépare du reste du pays l’extrême sud et les bordures de la baie du Bengale, à celui qui semble limiter l’implantation solide et durable du Bharatiya Janata Party, comme on l’a vu ci-dessus.
La distribution en vastes domaines peut évidemment être modifiée localement par des phénomènes jouant sur des ordres de grandeur plus faibles. Il en est ainsi des concentrations des populations définies comme «tribales». Comme elles sont recensées à part, on connaît leurs taux de féminité, qui sont variés mais tous relativement élevés. Ce sont les concentrations de ces populations qui expliquent largement les bons taux dans des espaces comme le nord-est de la péninsule et les bordures montagneuses.
15. Les structures démographiques: une opposition fondamentale |
Conclusion
Finalement, les processus de diffusion, les structures de la société, les systèmes de représentation se combinent pour construire une structure géographique que l’on a essayé de résumer sur la figure 15 au moyen d’une analyse factorielle en composantes principales, fondée sur cinq variables significatives entre lesquelles les corrélations positives ou négatives sont fortes, si bien que la première composante principale concentre une grande part de l’information, et permet de construire une image synthétique des informations relatives aux comportements démographiques et au sort fait aux femmes, nettement liés entre eux par des interactions claires. Les valeurs positives des coordonnées des districts sur l’axe 1 de l’analyse factorielle opposent une Inde plus féminine et davantage prête au freinage de la croissance démographique, que l’on serait tenté de dire (avec prudence et réserves) plus «ouverte», à une Inde qui l’est moins, à l’aune de facteurs socio-culturels, dont la nature et le rôle sont complexes et l’objet des débats évoqués plus haut. Ils produisent une image spécifique de l’Inde; elle vient compléter celles, assez différentes, qui procèdent des répartitions des densités et des villes et agglomérations, plus directement marquées par les temps de la nature et de l’économie.
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